Dans une société obsédée par la productivité, s’accorder une journée à ne rien faire relève presque de l’acte subversif.
Pourtant, loin d’être du temps perdu, ces parenthèses de farniente sont un rempart contre l’épuisement – et un cadeau précieux pour notre santé mentale. Et si la vraie performance consistait à savoir débrancher ?
Le mythe toxique de la productivité permanente
Nous vivons dans un monde qui idolâtre l’occupation constante, où l’oisiveté est assimilée à de la paresse. Entre les dossiers professionnels, les obligations familiales et les sollicitations numériques, nos agendas ressemblent à des champs de bataille chronométrés. Pourtant, des chercheurs de l’Université Yale tirent la sonnette d’alarme : un jour de repos complet par semaine n’est pas un luxe, mais une nécessité biologique. Leur étude révèle que ces pauses régulières réduisent le cortisol (l’hormone du stress), boostent l’immunité et préviennent les troubles anxieux.
L’ennui, ce génie créatif méconnu
« Je m’ennuie » : une phrase qui fait frémir les parents… à tort. Dans les colonnes de Marie Claire, la psychothérapeute Nathalie Rapoport-Hubschman défend ce vide apparent comme un espace vital : « C’est dans ces moments sans direction que le cerveau consolide les souvenirs, fait émerger des idées neuves et restaure ses capacités attentionnelles. » Regarder distraitement par la fenêtre, feuilleter un magazine sans but ou laisser son esprit vagabonder sous la douche – ces micro-suspensions de l’efficacité activent des réseaux cérébraux liés à l’introspection et à l’innovation.
Le « slow life » sur ordonnance
Et si on programmait la détente comme un rendez-vous immanquable ? L’équipe de Yale insiste : « Bloquez ces plages horaires comme vous le feriez pour une réunion importante – annulation interdite sauf urgence absolue. » Au programme ? Des activités délibérément non productives :
- Méditation (même 5 minutes) pour basculer en mode parasympathique,
- Balades « sans destination » en forêt ou en ville, l’œil ouvert aux détails poétiques,
- Création libre (aquarelle, collage, écriture intuitive) sans objectif de résultat,
- Rituels sensoriels comme un bain aux huiles essentielles ou une séance de fredagsmys – cette tradition suédoise de cocooning du vendredi soir.
Les regrets des mourants : un électrochoc
Une infirmière en soins palliatifs a recueilli les confessions de patients en fin de vie. Parmi leurs regrets récurrents ? « Avoir trop travaillé » et « ne pas m’être accordé de vraies pauses ». Preuve que notre obsession du doing (faire) nous éloigne souvent de l’being (être). Comme le résume Rapoport-Hubschman : « Débrancher le pilote automatique, c’est se reconnecter à ce qui compte vraiment – sa propre humanité. »
Démêler le vrai repos du faux
Attention : scroller passivement sur les réseaux ou binge-watcher une série ne compte pas comme une vraie pause. Ces activités maintiennent le cerveau en état d’hyperstimulation passive. La clé ? Des occupations sans attente de performance :
- Lire pour le plaisir (pas pour se cultiver),
- Cuisiner sans chronomètre,
- Jouer comme un enfant (puzzle, LEGO, coloriage),
- Rêvasser allongé dans l’herbe.
Alors, prêt à radicaliser votre emploi du temps ? Ajoutez-y un créneau sacré intitulé « Ne rien faire » – et défendez-le comme votre nouveau poste de travail le plus important.