
Un Secteur En Crise Profonde : L’Électroménager Face À L’Inflation
Les chiffres glacent le sang. Plus de 8 foyers français sur 10 se disent inquiets face à l’inflation grandissante qui ronge leur pouvoir d’achat. La réalité frappe encore plus fort : 9 Français sur 10 ont drastiquement réduit leurs dépenses en 2024, sacrifiant sorties, loisirs, mais surtout équipements de la maison.
Cette hémorragie budgétaire, révélée par les données de la CNEF, sonne le glas d’un secteur entier. L’électroménager s’enlise dans une spirale mortelle. Quand les familles serrent les boulons, elles reportent l’achat du lave-linge défaillant ou du réfrigérateur qui rend l’âme.
Le phénomène dépasse largement ce secteur. Mais les enseignes d’électroménager encaissent de plein fouet cette déferlante économique. Même les mastodontes vacillent. Fnac, Darty, Boulanger – ces noms qui incarnaient la solidité du commerce français – peinent désormais à joindre les deux bouts.
L’inflation ne fait pas de quartier. Elle transforme ce qui était hier un marché florissant en champ de bataille économique. Les rayons se vident, les clients se raréfient. Dans cette tourmente, une question lancinante émerge : qui survivra à cette tempête ? Les premiers signes de naufrage se multiplient déjà.

La Valse Des Fermetures : Quand Les Géants Tombent
Les premiers dominos s’effondrent avec fracas. La Fnac des Champs-Élysées, ce temple du commerce parisien, tire sa révérence définitivement. L’enseigne organise une braderie d’adieu pour écouler les derniers stocks. La foule se rue sur les bonnes affaires. L’affluence devient si massive que la braderie tourne court, submergée par des clients désespérés de saisir les ultimes occasions.
Darty enchaîne les mauvaises nouvelles. Les fermetures s’enchaînent à un rythme effréné : Châteaubourg ferme, Laval en Mayenne baisse le rideau, Chantepie suit le mouvement. Fougères n’échappe pas au massacre, Vitré en Ille-et-Vilaine capitule à son tour. Une hécatombe qui frappe toute la région.
Son rival Boulanger n’est pas épargné. En février dernier, l’enseigne abandonne Strasbourg. Le magasin du 30 rue du 22 novembre ferme après seulement quatre années d’exploitation. « Il ne s’agit pas d’une fermeture et ce n’est pas à cause de la concurrence, l’entreprise va très bien, nous avons reclassé tout le monde », se défend un responsable, tentant de minimiser l’ampleur du désastre.
Cette valse macabre des fermetures révèle une réalité brutale : même les plus solides vacillent. L’onde de choc se propage désormais vers des acteurs plus fragiles, prêts à subir le même sort.

Envie Amiens : « Fermeture Définitive » Actée
L’onde de choc frappe maintenant les plus vulnérables. À Amiens, rue Alfred-Catel, le magasin Envie tire sa révérence. Cette enseigne spécialisée dans l’électroménager rénové garanti jette l’éponge définitivement en septembre 2025.
La sentence tombe sans appel. « Dans un contexte économique difficile, cette décision, bien que douloureuse, est nécessaire pour préserver l’avenir de notre association Envie Nord qui poursuit sa mission d’insertion et de reconditionnement d’électroménagers sur ses autres sites des Hauts-de-France », annoncent les responsables du magasin.
Le communiqué révèle toute l’amertume de cette fermeture forcée. L’équipe dirigeante promet d’accompagner ses employés dans cette transition brutale. Une promesse qui résonne comme un dernier geste d’humanité avant la chute.
Les clients ne sont pas abandonnés pour autant. « Le suivi des appareils achetés qui rencontreraient un problème sera assuré dans les mêmes conditions par les autres sites d’Envie Nord », précise la direction. Une garantie de service qui masque mal la réalité : un concurrent de moins face aux géants chancelants.
Envie Amiens rejoint ainsi la longue liste des victimes. Son modèle économique basé sur le reconditionnement n’aura pas résisté à la tempête. Une fermeture qui préfigure d’autres effondrements à venir dans ce secteur en perdition.

Les Vraies Raisons D’Un Naufrage Annoncé
Ce secteur en perdition n’a pas sombré par hasard. Les chiffres révèlent l’ampleur du tsunami qui frappe l’électroménager traditionnel.
La Préfecture de la Somme, contactée par le Courrier Picard, décortique l’analyse implacable. « La concurrence du marché des biens de seconde main, l’augmentation du temps de travail par appareil reconditionné, la difficulté de commercialisation des ventes d’appareils et la baisse du prix de vente moyen » expliquent cette hécatombe annoncée.
Les géants numériques écrasent tout sur leur passage. Leboncoin attire 27,8 millions de visiteurs par mois, Vinted en comptabilise 16,6 millions. Ces plateformes raflent la mise : 84% des consommateurs se tournent vers des particuliers pour leurs achats d’occasion.
L’électroménager traditionnel suffoque face à cette déferlante. Le marché de la seconde main pèse désormais 7 milliards d’euros en 2024, avec une croissance foudroyante de 15% annuel. Trois Français sur quatre ont acheté de l’occasion cette année.
Les magasins physiques peinent à suivre le rythme. Leurs coûts de reconditionnement explosent quand les particuliers vendent directement leurs appareils en ligne. La rentabilité s’évapore face à cette concurrence déloyale.
L’équation devient insoluble. 88% des Français prévoient de réduire leurs dépenses en biens techniques en 2025. Entre inflation galopante et plateformes numériques dominantes, l’électroménager traditionnel signe son arrêt de mort. Le modèle économique historique s’effrite inexorablement.