En pleine tourmente diplomatique entre Paris et Alger, l’eurodéputée insoumise Rima Hassan a pris la parole ce lundi 7 juillet au Parlement européen pour dénoncer, avec force et conviction, l’attitude de la France vis-à-vis de son ancienne colonie. Une intervention tranchante, entre mémoire coloniale, dignité humaine et appels au respect mutuel.
Dès les premières minutes de son intervention, Rima Hassan a choisi une formule percutante : « Je le dis aux descendants de colons – ici, ils se reconnaîtront : l’Algérie n’est plus une colonie. » Une phrase forte, assumée, qui a immédiatement cristallisé les tensions autour de son discours. L’élue LFI n’a pas hésité à désigner une partie de l’élite politique française comme prisonnière d’un imaginaire colonial, incapable, selon elle, de revoir ses rapports à l’Afrique dans une perspective égalitaire.
La France accusée d’alimenter une « fracture diplomatique »
Selon Rima Hassan, la relation entre la France et l’Algérie reste gangrenée par des mécanismes postcoloniaux, dont la République française refuserait de se départir. « Le rapport au continent africain doit changer de ton et de posture », a-t-elle martelé, appelant à rompre avec l’arrogance diplomatique et l’ingérence politique. Elle dénonce ainsi une diplomatie française qui « alimente » volontairement les tensions avec Alger, plutôt que de chercher des voies de réconciliation.
Des crimes coloniaux encore tus, selon l’élue insoumise
En évoquant « des pays déstabilisés, pillés et abîmés dans leur chair par le colonialisme », Rima Hassan a accusé l’État français de refuser la pleine reconnaissance de ses crimes historiques. Elle déplore que ces crimes soient « niés ou tus », y compris dans les hautes sphères européennes. Pour elle, la mémoire coloniale reste un tabou, pourtant indispensable à affronter si l’on veut espérer bâtir un dialogue sincère avec les peuples africains.
Des prisonniers oubliés au cœur du plaidoyer
La députée n’a pas esquivé les dossiers sensibles de Boualem Sansal, écrivain franco-algérien arrêté, et du journaliste Christophe Gleizes, actuellement détenu en Algérie. Si elle déplore ces incarcérations, elle appelle néanmoins à une réaction « désintéressée », sans ingérence ni posture condescendante. Ce qui importe, selon elle, ce n’est pas d’humilier Alger mais de défendre la dignité humaine partout, y compris au sein de la société algérienne.
« L’Algérie s’honorerait à gracier les prisonniers d’opinion », a-t-elle plaidé, y voyant l’occasion pour le régime de Tebboune de se réconcilier avec ses propres citoyens. Une manière aussi, selon elle, d’être fidèle à l’héritage révolutionnaire du pays.
Un terrain miné : Sahara occidental, expulsions, ressentiment
Le discours de Rima Hassan s’inscrit dans un contexte diplomatique particulièrement tendu. L’année 2024 a été marquée par la reconnaissance par Emmanuel Macron de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, un geste perçu comme une provocation majeure par Alger, qui soutient le Front Polisario. Depuis, les tensions se sont multipliées : arrestations, expulsions de diplomates, refus de reprendre les Algériens sous OQTF.
Le climat est devenu délétère, alimenté par ce que certains considèrent comme une instrumentalisation de la colère antifrançaise par le régime algérien. Pour Rima Hassan, seule une politique étrangère fondée sur le respect mutuel, le multilatéralisme et la mémoire assumée permettra de sortir de cette impasse.