Un geste banal, presque mécanique. Pourtant, se curer le nez en public déclenche souvent une onde de malaise collective.
Jugé inesthétique, impoli ou déplacé, ce comportement, loin d’être purement anecdotique, en dit long sur nos codes sociaux, nos émotions… et notre rapport à l’intimité. Décryptage d’un réflexe révélateur.
Il suffirait d’un simple trajet dans le métro parisien ou d’une salle d’attente trop silencieuse pour que le malaise s’installe : un geste furtif, un doigt dans le nez, et soudain, les regards se détournent, les sourcils se haussent. Pourquoi un tel tollé face à un geste si universel ? Tout simplement parce qu’il transgresse l’une des règles implicites de notre société : la gestion du corps doit rester discrète, presque invisible. Comme l’explique le psychologue Alain Foucard, « dans nos cultures occidentales, certaines actions relèvent strictement de la sphère privée, et les sortir de ce cadre revient à perturber l’ordre social établi ».
Des normes culturelles… pas si universelles
Ce rejet n’est cependant pas universel. Dans certaines sociétés, le rapport au corps est plus pragmatique, et se curer le nez en public ne soulève ni gêne ni indignation. Ce qui choque ici peut sembler insignifiant ailleurs. Les réactions varient selon les codes sociaux et les normes d’hygiène intériorisées dès l’enfance. Preuve que notre regard sur ce geste n’est pas inné, mais bien appris.
Un signal de stress souvent inconscient
Sous des apparences anodines, le geste peut aussi cacher une tension plus profonde. Selon plusieurs psychologues, certains comportements répétitifs ou « maladroits » en public sont liés à l’anxiété ou au stress. Se curer le nez devient alors une manière de se réguler, de canaliser une nervosité diffuse. Comme d’autres gestes auto-apaisants – se mordiller les lèvres, jouer avec ses cheveux – il permet de recentrer l’attention sur soi dans une situation inconfortable. Un besoin de contrôle… qui peut vite tourner à l’automatisme embarrassant.
Impulsivité, oubli de soi… ou volonté de se faire remarquer ?
Chez d’autres personnes, l’acte relève davantage d’un déficit de contrôle de soi. Par impulsivité, par distraction ou par habitude, on agit sans prendre conscience du regard d’autrui. Mais certains cas peuvent aller plus loin : l’absence de retenue en public peut aussi trahir un besoin, inconscient ou non, d’attirer l’attention. Même si elle est désapprobatrice, toute réaction est mieux que l’indifférence totale, surtout pour celles et ceux en quête de validation, même négative.
L’enfance, berceau des gestes qui restent
Comme pour tant de comportements sociaux, l’éducation reçue durant l’enfance est déterminante. Un enfant qui n’a jamais été corrigé ou sensibilisé à la dimension privée de certains gestes corporels peut reproduire ces comportements à l’âge adulte sans en percevoir l’inconvenance. À défaut de repères, ce qui choque les autres ne choque pas celui qui agit. Une réalité fréquente dans les familles où les notions de pudeur ou de civilité ont peu de poids.
Un manque de codes sociaux plus qu’un manque d’hygiène
Se curer le nez en public n’est pas forcément une question d’impolitesse ou de provocation. Cela traduit parfois un déficit de socialisation, un manque de repères sur les limites entre espace privé et espace collectif. Dans un monde où les codes sociaux évoluent rapidement, certains adultes n’ont tout simplement pas intégré ces règles, surtout s’ils n’ont pas été confrontés à des environnements où ces normes étaient rigoureusement appliquées.