Les frais bancaires, en hausse constante depuis plusieurs années, s’invitent de nouveau dans le débat politique.

Ce jeudi 30 octobre, le Rassemblement national (RN) défendra à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à encadrer ces coûts jugés « abusifs » par ses élus. Une mesure présentée comme un geste en faveur du pouvoir d’achat, mais qui divise profondément le monde bancaire.
Portée par Jean-Philippe Tanguy, député RN et vice-président de la commission des finances, la proposition entend « limiter les frais bancaires injustes », qu’elle décrit comme « une charge abusive pour les ménages fragiles, les classes moyennes et les associations ».
Le texte dénonce des « pratiques prédatrices » transformant chaque incident — découverts, rejets de prélèvements, dépassements de plafond — en source de profit pour les banques.
Cette initiative intervient dans un contexte de hausse continue des tarifs bancaires, qui ont progressé de 3,1 % entre juin 2024 et juin 2025, selon l’Observatoire des tarifs bancaires du CCSF. En deux ans, la hausse atteint 6,2 %, un rythme supérieur à l’inflation moyenne sur la même période.
Les frais de tenue de compte constituent la catégorie la plus dynamique, avec une hausse de près de 9 % au premier trimestre 2025, après déjà +8,2 % en 2024.
Une proposition controversée dans le secteur

Le texte, rejeté en commission des finances, sera débattu dans le cadre de la niche parlementaire du RN, mais il a peu de chances d’être adopté. Le monde bancaire, lui, s’inquiète d’une mesure jugée contre-productive.
Dans un communiqué du 14 octobre, Frédéric Guyonnet, président du Syndicat national de la banque et du crédit (SNB/CFE-CGC), estime que cette réforme « risquerait de nuire à l’intérêt des clients eux-mêmes ».
Selon lui, les frais bancaires — qui représentent environ 0,49 % du budget moyen des ménages — permettent de financer les 33 000 agences françaises, 373 000 emplois et de garantir un accompagnement de proximité, notamment pour les clients en difficulté.
« La rémunération des services bancaires assure la pérennité du réseau, des emplois et de la qualité du service », rappelle-t-il, mettant en garde contre une réduction de l’offre et de l’emploi si la mesure était adoptée.
Les banques défendent un modèle déjà compétitif
Un argument repris par Daniel Baal, président de la Fédération bancaire française (FBF) et du Crédit Mutuel, pour qui les services bancaires français sont déjà les moins chers d’Europe.
« En France, le coût moyen des services bancaires représente 0,47 % du budget des ménages, contre 0,95 % en moyenne en Europe, et trois fois plus en Italie », a-t-il déclaré sur BFM Business.
Il souligne que la France dispose d’un réseau bancaire dense et accessible, tout en maintenant des coûts inférieurs à la moyenne européenne, un équilibre qu’il juge fragile face à toute tentative de régulation trop stricte.
Une question économique… et politique
Cette proposition s’inscrit dans une stratégie plus large du RN visant à s’ériger en défenseur du pouvoir d’achat. Le parti de Marine Le Pen reprend ici un thème déjà porté par les députés communistes en avril dernier, avant que leur texte ne soit retiré mi-octobre.
Si la mesure séduit une partie de l’opinion, son impact économique reste contesté. Les syndicats du secteur préviennent qu’une baisse forcée des frais pourrait affaiblir le maillage territorial, accélérer la fermeture d’agences, et accentuer la digitalisation du service, au détriment des publics les plus âgés ou isolés.










