Invitée de l’émission « Questions Politiques », Sarah Knafo n’a pas éludé le sujet sensible de la condamnation de Marine Le Pen.
Entre respect de la loi et appel à la souveraineté populaire, la députée européenne de Reconquête a esquissé une ligne de défense aux accents populistes assumés.
Condamnée en mars dernier dans le cadre de l’affaire des assistants parlementaires européens, Marine Le Pen a écopé de cinq ans d’inéligibilité avec exécution immédiate, assortie de quatre ans de prison, dont deux ferme, et d’une amende de 100 000 euros. La justice lui reproche, ainsi qu’au Rassemblement national, d’avoir utilisé des fonds publics européens à des fins partisanes, détournant ainsi les règles de fonctionnement de l’Union pour soutenir les activités du parti et de ses proches collaborateurs.
Cette décision de justice, prononcée par le tribunal administratif de Paris, s’inscrit dans la stricte application du droit. La peine d’inéligibilité, prévoyant l’exclusion temporaire de la vie politique pour des faits de détournement, est l’une des sanctions les plus sévères pouvant frapper un responsable public. Elle compromet sérieusement les ambitions présidentielles de la leader du RN.
Sarah Knafo entre respect des institutions et critique du système
Face à cette situation, Sarah Knafo ne conteste pas la légitimité de la justice. « Les juges ont raison d’appliquer la loi », reconnaît-elle sur le plateau de France Inter, Le Monde et franceinfo. Une affirmation claire, suivie toutefois d’un plaidoyer aux tonalités contestataires : « Mais c’est le peuple qui doit décider. »
Pour l’eurodéputée de Reconquête, il ne revient pas à la justice, aussi indépendante soit-elle, de trancher ce qui relève du destin électoral d’un homme ou d’une femme politique. Selon elle, cette prérogative appartient exclusivement aux citoyens, seuls habilités à juger moralement et politiquement leurs représentants. « Je considère que c’est au peuple de décider si le fait d’avoir détourné de l’argent mérite qu’on ne vote plus pour une personne ou qu’on vote quand même pour elle », affirme-t-elle avec fermeté.
Un plaidoyer inspiré du modèle suisse
Pour appuyer sa thèse, Sarah Knafo convoque l’exemple helvétique. En Suisse, rappelle-t-elle, les peines d’inéligibilité ont été abolies. Ce choix repose sur une conception démocratique radicale : les électeurs sont considérés comme suffisamment matures pour sanctionner eux-mêmes les comportements déviants. « Le peuple est assez adulte et assez mature pour juger », affirme la jeune députée.
Ce modèle de démocratie directe, où le citoyen prend le pas sur les institutions judiciaires, séduit de plus en plus certaines figures politiques françaises en quête de légitimité populaire. Pour Sarah Knafo, il s’agit d’une manière de réhabiliter la souveraineté du suffrage universel face à une justice perçue, parfois à tort, comme instrumentalisée ou politisée.
Une posture à double tranchant
Mais cette prise de position n’est pas sans risque. En contestant la portée politique d’une condamnation judiciaire, Sarah Knafo s’inscrit dans une logique qui peut fragiliser la confiance dans l’État de droit. Si la justice est remise en question chaque fois qu’elle touche une personnalité politique influente, c’est l’équilibre même des pouvoirs qui est menacé.