Figure combative du Parlement européen, Manon Aubry s’est imposée comme l’une des voix les plus offensives de la gauche radicale. Entre attaques frontales contre ses adversaires politiques et dénonciation de l’influence des lobbies à Bruxelles, l’eurodéputée de La France insoumise assume un positionnement clivant, quitte à provoquer malaise et polémiques.

Élue au Parlement européen en 2019, Manon Aubry n’a jamais cherché à se fondre dans le décor bruxellois. Portant avec constance les idées de La France insoumise, la trentenaire s’illustre par des prises de parole incisives et une volonté affichée de démonter les stratégies de ses adversaires. Parmi ses cibles privilégiées figure Jordan Bardella, président du Rassemblement national, avec lequel les échanges sont régulièrement électriques.
Jordan Bardella accusé d’absentéisme

Lors du dernier grand débat télévisé sur France 2 précédant les élections européennes, Manon Aubry n’avait pas mâché ses mots. Elle avait dénoncé ce qu’elle considère comme l’inactivité de Jordan Bardella au Parlement européen, rappelant qu’il n’aurait déposé que 76 amendements en cinq ans. Une pique assortie d’un surnom moqueur, « Barde-pas-là », qui n’avait pas manqué de faire réagir l’intéressé, visiblement agacé par l’attaque personnelle. Entre les deux eurodéputés, la rivalité idéologique se double d’un affrontement assumé.
Au-delà des querelles partisanes, Manon Aubry s’attaque aussi aux pratiques internes des institutions européennes. Consciente des privilèges dont bénéficient les élus, elle affirme ne pas vouloir les passer sous silence, y compris lorsqu’ils concernent son propre camp. Dès son premier Noël en tant qu’eurodéputée, elle avait choisi d’exposer publiquement un aspect peu connu du quotidien parlementaire : l’avalanche de cadeaux envoyés par divers lobbies à l’approche des fêtes.
Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, tournée avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Manon Aubry avait ironisé sur les présents reçus. Parmi eux, une bouteille de champagne en provenance de Russie et une photo de Vladimir Poutine, envoyées par l’ambassade russe. Une mise en scène volontairement provocatrice, destinée à illustrer ce qu’elle décrit comme « l’omniprésence et l’influence démesurée des lobbies » au sein des institutions européennes.

L’humour comme arme politique
Plutôt que de dramatiser, l’eurodéputée avait choisi le ton de la dérision. Elle s’était dite « un peu embêtée » par ces attentions, avant de proposer, sur un mode sarcastique, l’organisation d’un concours récompensant « les lobbies les plus créatifs ». Une manière, selon elle, de retourner le malaise en outil pédagogique et de sensibiliser l’opinion publique à des pratiques qu’elle juge problématiques.
Cette sortie n’a toutefois pas fait l’unanimité. Certains responsables politiques, y compris parmi ses alliés, ont estimé la démarche maladroite, voire contre-productive. La séquence a également valu à Manon Aubry des critiques de figures médiatiques, comme Sonia Mabrouk, qui ont pointé une communication jugée excessive. Preuve que la dénonciation des lobbies reste un terrain sensible, même lorsqu’elle s’appuie sur l’autodérision.
Malgré les critiques, Manon Aubry persiste et signe. Elle revendique une approche frontale, mêlant humour et dénonciation, pour exposer ce qu’elle considère comme les dérives du pouvoir à Bruxelles. En sollicitant même les internautes pour imaginer des catégories de son « concours des lobbies », l’eurodéputée entendait transformer une pratique opaque en sujet de débat public.










