Dans une France fragilisée par une crise persistante, un phénomène inattendu prend de l’ampleur : la revente d’or.
Entre nécessité financière, opportunité conjoncturelle et prudence face à l’avenir, de plus en plus de citoyens choisissent de transformer leurs bijoux en liquidités. Un refuge économique, devenu pour certains un véritable filet de survie. Depuis un an et demi, les Français serrent les cordons de la bourse. La crise économique, les incertitudes politiques et la hausse du coût de la vie ont transformé leur rapport à l’argent. Michel-Edouard Leclerc, président du comité stratégique des centres E. Leclerc, déplore ce climat anxiogène : selon lui, “la France n’est pas en faillite”, mais la dramatisation autour de la dette “pousse à l’épargne et freine les achats comme les investissements”. En clair, la peur paralyse la consommation et fige l’économie réelle.
L’or, nouvel eldorado des foyers français
Dans ce contexte morose, un métal précieux retrouve toute sa valeur : l’or. À Toulouse, près de la place du Capitole, Sandra Sanchez, responsable du Comptoir national de l’or, observe une affluence record. “Les gens en discutent, les médias en parlent, et un jour, ils se décident : ils font estimer leurs bijoux, sont surpris du prix, et vendent !”, confie-t-elle. L’augmentation continue du cours de l’or alimente cet engouement. Ce qui sommeillait dans les tiroirs devient, soudainement, une solution de trésorerie immédiate.
Entre urgence financière et choix de raison
Derrière chaque revente se cache une histoire intime, souvent marquée par le besoin. Isabelle, assistante sociale, a ainsi cédé ses chaînes et bagues pour 345 euros : “Je ne suis pas croyante, et ma mère non plus, ça ne la dérange pas.” Pour d’autres, c’est la nécessité qui prime. Une quadragénaire, mère de deux étudiantes à Paris, raconte son dilemme : avec 1 400 euros par mois, difficile de subvenir à tout. “L’une travaille seize heures par semaine, l’autre est en prépa. Alors j’ai cherché ce qui pouvait avoir de la valeur chez moi… Ce n’est pas grand-chose, mais ça aide pour la rentrée.” Ces gestes, modestes mais essentiels, témoignent d’une solidarité familiale souvent silencieuse.
Les seniors aussi surfent sur la vague dorée
Les retraités ne sont pas en reste. Nombre d’entre eux profitent de la flambée des prix de l’or pour arrondir leurs fins de mois. Certains obtiennent jusqu’à 5 000 euros en revendant des bijoux oubliés. Une opération d’autant plus avantageuse qu’elle n’est pas soumise à la taxe sur la revente. “De toute façon, je ne les porte plus, et eux n’en voudront pas”, confie une vendeuse âgée. D’autres ajoutent avec un sourire : “Ils préfèrent les voyages !” L’or devient ici un héritage liquide, échangé contre un peu de liberté.
Un réflexe partagé par toutes les classes sociales
Ce regain d’intérêt pour le métal précieux dépasse les clivages sociaux. Qu’il s’agisse de familles modestes cherchant à financer des études ou de ménages aisés souhaitant profiter d’une conjoncture favorable, la motivation reste la même : optimiser un patrimoine dormant. “Je n’apporte rien d’extraordinaire”, résume avec humilité un vendeur habitué. Pourtant, dans une période où le moindre euro compte, la revente d’or s’impose comme une solution pragmatique, presque rationnelle.