Souvent vanté pour ses bienfaits digestifs et anti-inflammatoires, le curcuma n’est pourtant pas sans danger. Aux États-Unis, une femme de 57 ans a frôlé la greffe du foie après avoir pris quotidiennement des gélules de curcuma. Une alerte de plus sur les risques liés aux compléments alimentaires, souvent perçus comme anodins.
C’est en mars dernier que Katie Mohan, 57 ans, décide de suivre les conseils d’un médecin repérés sur Instagram, qui évoquait les vertus anti-inflammatoires du curcuma, en particulier pour les douleurs articulaires. Convaincue par cette présentation, elle commence à consommer des gélules contenant du curcuma ou sa substance active, la curcumine, dans l’espoir de soulager ses douleurs chroniques.
Au fil des semaines, pourtant, la santé de l’Américaine décline lentement mais sûrement. Maux d’estomac persistants, nausées, fatigue, urines foncées… Autant de symptômes qu’elle ne relie pas immédiatement à la prise quotidienne de ces compléments. « Je ne me sentais pas bien en général », confie-t-elle plus tard à NBC News. Le lien entre ces troubles et sa routine de supplémentation lui échappe totalement.
Une révélation télévisée et une hospitalisation d’urgence
C’est en mai que la situation bascule. En regardant un reportage sur la hausse inquiétante des cas d’intoxication hépatique liés aux plantes médicinales, Katie Mohan comprend enfin. « J’ai eu une révélation. J’avais empoisonné mon foie », déclare-t-elle. Le lendemain, elle se rend aux urgences, où une batterie d’analyses révèle des résultats alarmants.
Les examens montrent un taux d’enzymes hépatiques 60 fois supérieur à la normale, une indication claire d’un dysfonctionnement hépatique majeur. Rapidement transférée dans un hôpital spécialisé à New York, elle frôle l’insuffisance hépatique terminale. « Katie était à deux doigts d’une greffe », confirme le Dr Nikolaos Pyrsopoulos, hépatologue au NYU Langone.
Pendant six jours, la patiente est placée sous traitement intensif, avec perfusions et surveillance constante. Grâce à une prise en charge rapide, son foie commence à se régénérer, et elle peut regagner son domicile début juillet. Éprouvée, elle confie : « Je ne prendrai plus jamais de compléments alimentaires ! »
Des effets secondaires connus mais sous-estimés
Le cas de Katie Mohan n’est pas isolé. En 2022, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a recensé une centaine de signalements d’hépatites liées à des gélules de curcuma, confirmant que cette plante, pourtant naturelle, n’est pas exempte de risques. Le danger réside souvent dans les concentrations élevées de curcumine contenues dans certains compléments, bien supérieures à ce que l’on trouve dans l’alimentation.
Le curcuma est formellement déconseillé dans plusieurs situations médicales :
Obstruction des voies biliaires,
Antécédents de maladies hépatiques,
PUBLICITÉ:Ulcères de l’estomac ou du duodénum,
Calculs rénaux.
Dans ces cas, une supplémentation peut aggraver les symptômes ou provoquer des lésions internes graves. Pourtant, ces informations figurent rarement de façon explicite sur les emballages des produits disponibles en ligne ou en parapharmacie.
Une dose maximale à ne pas dépasser
Selon l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), la dose journalière admissible de curcumine est de 180 mg pour un adulte de 60 kg. Au-delà de ce seuil, les risques d’effets indésirables augmentent sensiblement, surtout en cas de consommation prolongée. Le problème, c’est que beaucoup de consommateurs ignorent totalement cette limite, ou pensent que « naturel » rime forcément avec « inoffensif ».
Les compléments alimentaires échappent encore à une régulation aussi stricte que les médicaments, ce qui rend leur usage plus risqué qu’on ne le croit. Sans avis médical, leur consommation peut entraîner des complications graves, comme l’ont montré de nombreux cas ces dernières années.
Le curcuma : utile, mais pas sans précautions
S’il ne fait aucun doute que le curcuma possède des propriétés bénéfiques en matière de digestion, d’inflammation et d’oxydation, il doit être consommé avec modération et discernement. En usage culinaire, il ne présente pas de danger connu. En revanche, sous forme concentrée, il nécessite un encadrement médical, surtout chez les personnes fragiles.
Le parcours de Katie Mohan illustre une tendance inquiétante : la médicalisation de l’automédication, alimentée par les réseaux sociaux, les influenceurs santé et les promesses miracles. Son témoignage, salvateur, alerte sur l’urgence d’une vigilance accrue face à l’essor des produits dits naturels, dont les effets secondaires sont encore trop souvent sous-estimés.