Dans une France où le coût de la vie pèse sur tous les ménages, certains retraités n’ont pas d’autre choix que de poursuivre une activité professionnelle.

Par nécessité économique, pour préserver une sociabilité ou par simple attachement à leur métier, ils prolongent leur engagement bien au-delà de l’âge légal. Les retraités qui choisissent ou doivent reprendre une activité sont de plus en plus nombreux. On les appelle les « cumulants », un terme qui désigne ceux qui perçoivent une pension tout en continuant à travailler. Le phénomène s’amplifie, porté par des pensions insuffisantes, l’inflation et le besoin de rester inséré dans la société.
Selon les données de l’Insee, près de 600 000 personnes cumulaient en 2023 retraite et emploi, soit une augmentation de 33 % en moins de dix ans. Cette évolution, loin de correspondre à une envie généralisée de rester actif, révèle surtout la fragilité financière de nombreux retraités.
Une réalité économique souvent difficile
Derrière ces situations se cachent des histoires individuelles parfois éprouvantes. Pascal, artisan-taxi de 69 ans, continue de sillonner les routes. Sa retraite cumulée avec celle de sa femme handicapée n’atteint que 1 400 euros, tandis que leur loyer s’élève à 1 000 euros. « Je n’ai pas le choix », confie-t-il. Son travail devient un rempart contre la précarité plutôt qu’une activité choisie.

Il ironise sur son « mi-temps » de 35 heures, lui qui se lève chaque jour à 4 heures du matin. Ce rythme éreintant, il l’accepte, mais pointe une injustice : bien que les « cumulants » continuent de cotiser, ces cotisations ne revalorisent ni leur pension ni leurs trimestres. « On liquide nos droits… quel joli mot », lâche-t-il avec amertume.
Des femmes plus touchées par le cumul emploi-retraite
À 73 ans, Rose raconte un quotidien similaire. Elle partage ses journées entre la maison, ses chats, et quelques heures de travail. Sa pension de 1 060 euros ne suffit pas à couvrir son loyer de 450 euros, encore moins les dépenses essentielles. Son engagement professionnel devient une nécessité, une manière de continuer à vivre dignement.
Pour beaucoup de femmes, dont les carrières ont été fragmentées par les congés familiaux ou des emplois à temps partiel, la retraite s’avère particulièrement faible. Le cumul emploi-retraite devient alors une solution incontournable, mais rarement confortable.
Briser le mythe du retraité aisé

Juliette, elle, dément l’image du retraité qui profite de loisirs et voyages. « J’aurais aimé faire une croisière, mais mes finances ne me le permettent pas », dit-elle. Avec une pension de seulement 1 000 euros et un loyer de 600 euros, elle travaille comme dame de compagnie pour doubler parfois ses revenus. Son emploi n’est pas un choix, mais une adaptation nécessaire à une réalité économique dure.
La solidarité, parfois informelle, entre anciens travailleurs
Dans certains cas, la nécessité conduit même à des arrangements discrets. Francisco, 78 ans, a pris sa retraite, mais il voit des amis dans des situations plus difficiles. L’un d’eux, menuisier de 86 ans, a continué à travailler de manière informelle, effectuant de petits travaux pour arrondir une pension de 900 euros. Cet exemple illustre comment, face à la faiblesse des retraites, la débrouille peut devenir une survie.










