Pas d’augmentation d’impôts, promet François Bayrou. Mais un gel du barème fiscal qui revient, dans les faits, à faire payer davantage les Français. Derrière les effets d’annonce, le projet budgétaire 2026 s’appuie sur une hausse implicite de l’imposition, touchant de plein fouet les classes moyennes et les ménages modestes.
Lors de sa conférence de presse du mardi 15 juillet, François Bayrou a présenté son plan de redressement budgétaire, censé permettre à la France de réaliser plus de 43 milliards d’euros d’économies en 2026. Parmi les leviers évoqués, le gel du barème de l’impôt sur le revenu. Une mesure technique, mais aux conséquences immédiates : les tranches d’imposition resteront inchangées l’an prochain, malgré l’inflation et la revalorisation des salaires.
Ce blocage signifie qu’un salarié légèrement augmenté verra son impôt grimper, non pas parce qu’il a changé de tranche, mais parce que ses revenus bruts ont dépassé le seuil initial. En clair : l’impôt augmente… sans que le taux lui-même ne change. Une forme de hausse déguisée, redoutée par les économistes et critiquée par une partie de l’opinion.
Des hausses d’impôts discrètes mais massives
L’exemple est parlant : un salarié célibataire gagnant 2 000 euros par mois, revalorisé de 2 % en janvier, verra son impôt annuel passer de 725 à 794 euros, soit 69 euros de plus, selon L’Internaute. Cela peut sembler modeste, mais sur l’ensemble des contribuables concernés, les gains pour l’État se chiffrent en milliards d’euros.
Et certains foyers jusqu’ici non imposables vont passer de l’autre côté de la ligne. Ainsi, un salarié payé 1 540 euros en 2024 ne devait rien au fisc. Mais si son salaire est passé à 1 570 euros en 2025, il devra payer 32 euros d’impôt en 2026. Pour beaucoup de ménages modestes, chaque euro compte, et cette bascule vers l’imposition, même symbolique, marque une rupture.
Une stratégie budgétaire sous tension sociale
Face aux critiques, le Premier ministre assume pleinement la logique de l’effort partagé. Il parle d’« année blanche », une pause dans la revalorisation automatique du barème, au nom de la solidarité nationale. « Tout le monde devra participer à l’effort face à l’ampleur de l’enjeu », a-t-il déclaré, tout en martelant qu’aucune hausse des impôts en tant que telle n’était prévue.
Mais pour les économistes, le gel du barème revient à augmenter les impôts de manière indirecte. Il s’agit d’une mesure silencieuse, peu visible politiquement, mais efficace sur le plan comptable. Une manière de renflouer les caisses de l’État sans faire voter de hausse de taux, donc sans soulever immédiatement un tollé parlementaire.
Les hauts revenus également visés
En parallèle de ce gel, François Bayrou a également annoncé une « contribution de solidarité » ciblant les plus hauts revenus, ainsi qu’une offensive contre les « niches fiscales inefficaces ». L’optimisation des patrimoines dits « non productifs » — autrement dit les placements qui ne participent pas à l’économie réelle — sera également dans le viseur.
Cette partie du plan vise à rendre le dispositif plus équitable, en équilibrant la hausse d’impôt implicite pour les classes moyennes par une participation accrue des contribuables les plus fortunés. Mais les modalités concrètes de cette contribution restent floues, et feront sans doute l’objet de débats houleux à l’Assemblée à l’automne, lors du vote du budget.
Un objectif ambitieux : stabiliser les dépenses en 2026
L’objectif du gouvernement est clair : ne pas augmenter les dépenses publiques par rapport à 2025, afin d’inverser la spirale de l’endettement. La dette française dépasse désormais 3 300 milliards d’euros, soit 5,8 % du PIB en 2024, un niveau jugé « intenable » par Bercy.
François Bayrou entend maintenir les engagements européens et rétablir la crédibilité budgétaire de la France sur les marchés internationaux. Mais ce redressement repose sur des mesures d’austérité douce, peu spectaculaires mais potentiellement douloureuses, notamment pour les ménages situés juste au-dessus du seuil de pauvreté ou dans les premières tranches d’imposition.