À l’heure où les régimes “sans” se multiplient, le gluten est devenu un coupable désigné. Nombreux sont ceux qui l’évincent sans raison médicale, dans l’espoir d’un mieux-être digestif.
Contenu dans le blé, le seigle ou l’orge, le gluten est une protéine végétale que notre organisme peut parfaitement ignorer sans conséquences vitales. Il ne s’agit pas d’un nutriment indispensable, comme le rappelle le professeur Stéphane Schneider, gastro-entérologue au CHU de Nice. Toutefois, cela ne signifie pas qu’il faille l’éliminer sans discernement. Pour les malades cœliaques, diagnostiqués après des examens médicaux précis, l’éviction totale du gluten est impérative, car elle seule permet d’éviter une inflammation chronique de l’intestin grêle.
En revanche, pour les personnes en bonne santé, l’arrêt du gluten n’offre aucun bénéfice avéré. « En dehors de toute raison médicale, le bénéfice de l’arrêt est nul« , insiste le spécialiste. L’espérance de vie des malades cœliaques, bien suivis, est identique à celle de la population générale.
Hypersensibilité ou effet de mode ?
Face aux témoignages de mieux-être après un régime sans gluten, les experts évoquent un autre trouble méconnu : l’hypersensibilité non cœliaque. Cette forme d’intolérance légère, encore mal comprise, ne nécessite pas une exclusion stricte du gluten, mais plutôt une adaptation alimentaire. Le gastro-entérologue recommande alors une démarche encadrée, d’abord médicale pour écarter la maladie cœliaque, puis nutritionnelle avec l’accompagnement d’un(e) diététicien(ne).
Réduire ponctuellement le gluten peut apaiser certains troubles digestifs sans pour autant imposer un bannissement total, qui serait à la fois inutile et potentiellement dangereux pour l’équilibre nutritionnel.
Les risques cachés d’un régime sans gluten
Exclure le gluten sans suivi peut sembler anodin, mais ce choix comporte des effets secondaires insoupçonnés. En coupant certaines céréales de son alimentation, on risque de déséquilibrer son apport en fibres, en vitamines du groupe B, en fer et en minéraux essentiels. D’autant plus que les produits industriels estampillés “sans gluten” sont souvent ultratransformés, chers et peu recommandables sur le plan nutritionnel.
Comme le rappelle le Pr Schneider, « les alternatives vendues en supermarché ne sont pas toujours synonymes de santé ». Certains pains ou biscuits sans gluten contiennent plus d’additifs et de graisses que leurs équivalents classiques. Le remède peut alors devenir pire que le mal.
Les bonnes alternatives : entre tradition et bon sens
Pour ceux qui souhaitent modérer leur consommation de gluten sans la supprimer complètement, des solutions simples et saines existent. La diététicienne Hanna Bensemhoun recommande de privilégier le pain au petit épeautre, plus digeste et naturellement moins riche en gluten, souvent proposé en boulangeries artisanales.
En cuisine, préparer ses pâtes à tarte maison avec des farines alternatives – comme celles de quinoa ou de châtaigne – permet d’éviter les produits industriels tout en maîtrisant les ingrédients. Autre astuce : les pâtes de blé dur seraient mieux tolérées que le pain classique, selon certaines observations digestives.