Un fait divers pour le moins troublant secoue l’Espagne. À Cadix, une ancienne caissière, reconnue invalide depuis 2003 pour un prétendu mutisme post-traumatique, se retrouve aujourd’hui au cœur d’un scandale de fraude à la pension d’invalidité. Une enquête minutieuse a révélé une tout autre réalité, remettant en cause des années de prestations.
L’affaire remonte à 2003. À l’époque, une employée de supermarché est victime d’une violente agression par un client sur son lieu de travail, à Cadix. Le traumatisme est tel qu’elle développe, selon les premiers diagnostics médicaux, un mutisme d’origine psychologique. Ce trouble, attribué à un stress post-traumatique sévère, lui vaut la reconnaissance officielle de handicap par la mutuelle de son entreprise, qui lui accorde une pension d’invalidité permanente.
Pendant seize ans, elle perçoit cette aide financière en tant que victime d’un accident du travail, considérée comme définitivement incapable de reprendre une activité professionnelle normale en raison de son incapacité à parler.
Les soupçons surgissent des années plus tard
Mais en 2019, l’affaire prend une tournure inattendue. Son propre psychiatre émet des doutes quant à la véracité de son trouble, décelant chez sa patiente des « indices de simulation ». Le professionnel alerte alors la mutuelle, qui décide de mener des vérifications. L’organisme engage un détective privé afin de surveiller les faits et gestes de la bénéficiaire.
Et les résultats de cette filature sont accablants : la femme est surprise à plusieurs reprises en train de parler normalement en public, notamment en échangeant avec d’autres parents d’élèves devant une école, en répondant au téléphone ou encore en donnant des indications dans la rue — y compris au détective lui-même.
Des preuves irréfutables captées en vidéo
Ces moments de conversation sont intégralement captés par le détective et enregistrés à des fins judiciaires. Les vidéos et enregistrements sonores sont transmis à la justice comme éléments de preuve. Le tribunal ne tarde pas à conclure que le prétendu mutisme n’est plus d’actualité, voire qu’il n’a jamais existé. Selon les juges, il s’agirait d’une « simulation de pseudo-mutisme », ou à tout le moins d’une « évolution très favorable » de ses symptômes, désormais inexistants.
Face à cette révélation, la femme tente de se défendre en dénonçant une atteinte à ses droits fondamentaux. Elle argue d’une violation de sa vie privée et de son honneur, mais le Tribunal supérieur d’Andalousie (TSJA) rejette catégoriquement cette ligne de défense. La cour estime que les preuves ont été obtenues de manière légitime et qu’aucun droit constitutionnel n’a été bafoué.
Une amende… et peut-être bien plus
La sanction tombe : la fausse muette écope d’une amende pouvant aller jusqu’à 6.000 euros, selon les sources judiciaires relayées par le quotidien ABC de Cádiz. Mais l’affaire ne s’arrête pas là. Le dossier est désormais entre les mains du parquet, qui devra statuer sur d’éventuelles poursuites pénales pour escroquerie à la Sécurité sociale.
En parallèle, l’administration espagnole devra décider si elle exige le remboursement intégral des prestations perçues durant ces seize années, ce qui représenterait une somme colossale. Selon Daniel Fontanals, le détective privé à l’origine de l’enquête, « c’est une somme énorme », rappelant que la femme a continué à percevoir la quasi-totalité de son ancien salaire pendant toutes ces années.