Une simple prise de parole sur les réseaux sociaux a suffi à déclencher une tempête institutionnelle. Sarah Knafo, eurodéputée et magistrate à la Cour des comptes, est désormais convoquée pour avoir publiquement critiqué un haut responsable de l’Agence française de développement.

Mais derrière cette convocation se jouent des tensions politiques, réglementaires et personnelles qui dépassent largement un tweet. Le 3 décembre, Sarah Knafo publie un message visant Rémy Rioux, président de l’AFD et favori pour succéder à Pierre Moscovici à la Cour des comptes. Elle l’accuse d’avoir « endetté l’institution de 60 milliards d’euros » et s’indigne de sa possible nomination. Ce n’est pas la critique qui pose problème, mais la manière : en précisant avoir travaillé un temps pour la Cour, elle aurait enfreint la règle qui interdit aux magistrats de mentionner leur statut lorsqu’ils s’expriment en dehors du cadre institutionnel. Selon la Cour des comptes, « elle peut critiquer, mais pas en se prévalant de son appartenance ». D’où une convocation destinée à lui rappeler la déontologie en vigueur.
Une fuite interne qui alimente le malaise
L’eurodéputée a appris cette convocation… par un journaliste du Parisien. Une fuite qui soulève de nombreuses questions. Qui, au sein de la Cour, a transmis l’information à la presse ? Elle s’en est indignée sur CNews, estimant que la véritable faute morale résidait dans cette divulgation. Pour elle, cette fuite porte atteinte à l’image d’une institution déjà fragilisée par plusieurs controverses. La transparence excessive de certains agents contraste ironiquement avec le reproche de manque de réserve qui lui est adressé.

Une institution minée par les soupçons de politisation
Depuis plusieurs mois, la Cour des comptes essuie des critiques sur son indépendance. La présidence de Pierre Moscovici, ancien ministre socialiste, alimente les accusations d’orientation politique. Plusieurs décisions ont récemment été pointées du doigt : retards supposés de publications sensibles, notamment sur l’immigration ou la gestion de l’audiovisuel public, gouvernance jugée « très politique », décisions « arbitraires ». Dans ce contexte, la montée en puissance de Sarah Knafo — politiquement située à l’opposé — cristallise tensions et méfiances.
Rémy Rioux, un profil qui divise

L’homme qu’elle vise, Rémy Rioux, n’est pas inconnu des cercles politiques. Haut fonctionnaire identifié à la gauche, ancien directeur de cabinet de Pierre Moscovici, il dirige l’AFD depuis 2016. Ses déclarations sur « l’africanité » de l’agence ont suscité de vifs débats. Knafo elle-même s’y est déjà opposée publiquement, dénonçant un discours idéologique. Ses critiques répétées ont fini par lui attirer de solides inimitiés — ce qui donne à cette affaire une dimension résolument politique.
L’ascension fulgurante d’une figure qui dérange
En moins d’un an, Sarah Knafo s’est imposée dans le débat public. Sondée à 6,5 % pour la présidentielle de 2027, elle inquiète autant qu’elle fascine. Sa maîtrise des dossiers, son aisance médiatique et son style offensif font d’elle la nouvelle bête noire de nombreux responsables de gauche et de la majorité. Plusieurs ont refusé de débattre avec elle, craignant l’affront direct. Même dans son propre camp, son influence agace : relations rompues avec Marion Maréchal, tensions avec Jean-Philippe Tanguy…










