Derrière l’amour et le partage du quotidien, les finances d’un couple dissimulent souvent des inégalités profondes. Si la répartition des tâches est débattue, celle des dépenses l’est beaucoup moins. Pourtant, les chiffres sont sans appel : l’écart de revenus explose dès que deux individus s’unissent sous le même toit.

Selon une étude de l’Observatoire Société et Consommation, relayée par L’Agefi, l’écart de revenus entre hommes et femmes passe de 9 % avant la vie de couple à 42 % après l’installation commune. Ce fossé s’élargit encore avec la naissance d’un enfant : la femme réduit souvent son temps de travail, tandis que l’homme maintient sa carrière. Cette asymétrie, souvent invisible, sape peu à peu l’équilibre économique du couple.
Le pot de yaourt : une métaphore qui en dit long

L’écrivaine Titiou Lecoq illustre brillamment ce déséquilibre dans Le couple & l’argent, avec sa célèbre théorie du “pot de yaourt”. Elle y raconte l’histoire fictive de Roméo et Juliette : deux salariés partageant les frais équitablement… jusqu’à la naissance de leur enfant. Juliette réduit son activité, Roméo continue à plein temps. Pourtant, les dépenses restent partagées à parts égales. Quand vient l’achat d’une voiture, c’est Roméo qui finance. Juliette, elle, couvre les petites dépenses du quotidien : les courses, les fournitures, les… pots de yaourt. À la séparation, Roméo repart avec le bien durable, Juliette avec les dépenses éphémères. Une métaphore cruelle, mais révélatrice du déséquilibre patrimonial des couples modernes.
Des habitudes financières qui s’installent dès les débuts

Ces inégalités ne se forment pas du jour au lendemain. La sociologue Ingrid Voléry rappelle que les “routines financières” se mettent en place dès la première cohabitation et façonnent durablement la gestion du couple. Ce qui semblait anodin — payer le plein d’essence, faire les courses, acheter des vêtements — devient un schéma répétitif. Et plus les années passent, plus il est difficile d’en sortir.
Autre changement notable : la fin de la mise en commun des revenus. Les couples d’aujourd’hui tendent à séparer leurs finances, chacun conservant son compte et son autonomie. Cette évolution, confirmée par les chercheuses Sarah Benmoyal Bouzaglo et Corina Paraschiv, renforce parfois les écarts : “L’argent n’est plus perçu comme un bien commun au sein du couple”, écrivent-elles, soulignant le recul du partage solidaire au profit d’une gestion individualisée.










