Et si nos yeux pouvaient trahir les premiers signes d’une démence bien avant les pertes de mémoire ?
De récentes recherches montrent que l’examen de la rétine, grâce à un simple fond d’œil, pourrait devenir un outil précieux pour dépister la maladie d’Alzheimer et d’autres formes de démence, parfois vingt ans avant les premiers symptômes visibles. La démence, dont la maladie d’Alzheimer est la forme la plus répandue, touche principalement la mémoire, la parole ou encore l’orientation. Mais bien avant ces signes cliniques, les vaisseaux sanguins de petit diamètre présents dans la rétine peuvent s’altérer. Leur déformation, leur tortuosité ou leur dilatation seraient autant d’indices précoces d’un risque accru de démence.
La rétine, une fenêtre sur le cerveau
Pourquoi l’œil serait-il un indicateur si pertinent ? Parce que la rétine est une extension directe du système nerveux central. Les altérations microvasculaires observées dans l’œil reflètent donc celles qui peuvent se produire dans le cerveau. Selon une étude menée par l’Université de Bordeaux auprès de plus de 500 personnes de plus de 72 ans suivies pendant dix ans, les anomalies rétiniennes sont fortement corrélées à l’apparition d’une démence.
La directrice de recherche de l’Inserm, Catherine Helmer, précise : « Les personnes présentant une tortuosité artérielle accrue au niveau de la rétine ont un risque plus élevé de développer une démence dans les dix années suivantes. » De même, un diamètre veineux augmenté serait associé à l’apparition de démences mixtes ou d’origine vasculaire.
Un examen simple et peu coûteux
Face à ces résultats, le fond d’œil apparaît comme une solution accessible et rapide. Contrairement à l’imagerie cérébrale, coûteuse et lourde à mettre en place, cette technique courante permet d’analyser la microvascularisation de la rétine en quelques minutes. Détecter tôt les personnes à risque pourrait ainsi favoriser une meilleure prise en charge et ralentir l’évolution des troubles cognitifs.
Des recherches confirmées à l’international
Ces observations ne sont pas isolées. Des équipes américaines et néo-zélandaises ont confirmé le lien entre modification du calibre des vaisseaux rétiniens et apparition ultérieure de démences. La neuroscientifique Alaina Reagan souligne : « Votre rétine est en quelque sorte votre cerveau, mais elle est beaucoup plus accessible. Les premiers signaux peuvent être visibles vingt ans avant les dommages cognitifs. »
Une piste d’avenir pour la prévention
Si la recherche doit encore préciser les modalités de dépistage et les seuils de risque, le fond d’œil pourrait devenir un outil de prévention incontournable dans les prochaines années. En permettant d’identifier précocement les patients fragiles, il ouvrirait la voie à des mesures de suivi renforcé, à des interventions thérapeutiques plus ciblées et à un ralentissement potentiel de la perte d’autonomie.