L’industrie française perd l’un de ses symboles historiques. La liquidation judiciaire de Brandt, dernier grand fabricant national d’électroménager, marque la fin d’un siècle d’activité et laisse 700 salariés sous le choc. Malgré une mobilisation exceptionnelle de l’État et des collectivités, aucune solution de reprise n’a pu être retenue.
Le tribunal de Nanterre a tranché ce 11 décembre : Brandt est officiellement liquidé, trois mois après son placement en redressement judiciaire. Cette décision scelle le sort de l’entreprise, installée dans le paysage industriel depuis plus de cent ans. Le président de la région Centre-Val de Loire, François Bonneau, a immédiatement réagi, évoquant « un choc majeur » pour l’économie française et un traumatisme pour les 700 emplois menacés. Malgré des soutiens multiples, l’audience n’a laissé aucune porte de sortie.
Une offre de reprise en Scop rejetée malgré un soutien massif
Parmi les projets déposés, seule l’offre de reprise sous forme de Scop, portée avec le soutien du groupe Revive, permettait de sauver environ 300 postes. Salariés, élus locaux, pouvoirs publics : tous soutenaient cette option, considérée comme la dernière chance de maintenir une activité industrielle en France. Mais relancer Brandt nécessitait entre 20 et 25 millions d’euros — un investissement que les acteurs financiers essentiels n’ont pas souhaité engager. L’État, qui avait promis 5 millions d’euros, n’a pas pu à lui seul sauver l’entreprise, malgré une mobilisation rare.
L’État et les collectivités impuissants face à l’absence d’investisseurs
Les ministres Roland Lescure et Sébastien Martin ont exprimé leur « profonde tristesse » après l’annonce de la liquidation. Ils rappellent avoir « fait feu de tout bois », soulignant la mise à disposition d’aides publiques atteignant plus de 20 millions d’euros avec le concours de la région et de la métropole d’Orléans. Pourtant, aucun partenaire privé n’a voulu prendre part à l’opération, condamnant les usines d’Orléans et de Vendôme à la fermeture. Cette absence d’engagement extérieur a scellé le destin de Brandt, malgré des arguments forts autour du maintien d’un savoir-faire français.
Une colère profonde chez les salariés
Sur les sites du Loiret et du Loir-et-Cher, l’annonce a provoqué une onde de choc mêlant rage, incompréhension et détresse. Devant l’usine, certains salariés ont brûlé des documents administratifs pour symboliser leur adieu à Brandt. « Les fêtes de Noël seront tristes », confie Célia Pinto, encore sous le coup de l’émotion. Le syndicaliste CGT Melkonyan Khachatur parle d’un « beau cadeau de Noël », amer constat d’une lutte perdue malgré des mois de mobilisation. L’idée d’un avenir industriel local s’effondre, laissant des familles et des territoires dans l’incertitude.
Un secteur du gros électroménager en crise profonde
Propriété du groupe algérien Cevital depuis 2014, Brandt réalisait encore 260 millions d’euros de chiffre d’affaires. Mais l’entreprise souffrait des conséquences de la crise immobilière, qui pèse lourdement sur les achats d’appareils de cuisine ou de gros électroménager. Après une baisse des ventes en 2023, l’année 2024 s’est soldée par un nouveau recul de 3,9 %. Un marché affaibli, une concurrence internationale féroce et l’absence d’investissements structurants ont fini par emporter ce qui restait du géant français.













