À peine installé à Matignon, Sébastien Lecornu engage un bras de fer symbolique mais attendu : mettre fin aux privilèges à vie accordés à certains anciens ministres et Premiers ministres. Une réforme qui vise à redorer l’image de l’État et à répondre à une opinion publique lassée des passe-droits.
Dans un entretien accordé à la presse régionale, Sébastien Lecornu a annoncé vouloir « mettre fin aux derniers privilèges accordés à vie » aux anciens membres du gouvernement. Secrétariat, voiture avec chauffeur, protection policière… Ces avantages, hérités de traditions républicaines ou fixés par décret, pèsent lourd dans le budget public. « On ne peut pas demander aux Français des efforts si ceux qui sont à la tête de l’État n’en font pas », a insisté le Premier ministre, selon Le Parisien. Son entourage promet de rouvrir le dossier « très vite », confirmant une volonté d’agir rapidement.
Des avantages encadrés mais parfois sans limite de durée
Le décret du 20 septembre 2019 définit une partie de ces privilèges. Les anciens Premiers ministres peuvent solliciter un agent de secrétariat pendant dix ans maximum et jusqu’à 67 ans, sauf s’ils disposent déjà d’une assistance dans le cadre d’un mandat public.
François Bayrou et Michel Barnier, âgés de 74 ans, ne peuvent donc plus en bénéficier. En revanche, l’usage d’une voiture avec chauffeur et d’une protection policière n’est soumis à aucune limite de temps, une pratique issue d’une « tradition républicaine non écrite ».
Les ministres aussi concernés
Les anciens ministres touchent une indemnité temporaire de trois mois, équivalente à leur salaire d’environ 10 000 € mensuels, sauf s’ils retrouvent un emploi rémunéré. Certains peuvent également bénéficier d’une protection policière prolongée, notamment s’ils ont occupé des fonctions sensibles comme l’Intérieur, la Justice ou la Défense. Lecornu veut mettre fin aux dérives possibles, estimant que ces avantages doivent rester exceptionnels et encadrés.
Un coût croissant pour les finances publiques
Selon un rapport parlementaire, les frais liés aux anciens Premiers ministres ont atteint 1,42 million d’euros en 2023, en hausse de 11 % par rapport à 2022. Les montants varient fortement : 154 730 € pour Édith Cresson, 197 540 € pour Dominique de Villepin, 201 387 € pour Bernard Cazeneuve, contre seulement 3 607 € pour Jean Castex. Ces chiffres nourrissent un débat récurrent sur le train de vie de l’État, déjà évoqué par Michel Barnier lors de son passage à Matignon.
Une réforme aux résonances politiques fortes
En s’attaquant à ces privilèges, Sébastien Lecornu entend envoyer un signal clair aux Français : les responsables politiques ne doivent pas rester à l’écart des efforts collectifs. Cette démarche pourrait toutefois susciter des résistances au sein de la classe politique et relancer un débat sensible sur l’équilibre entre reconnaissance du service rendu et exemplarité républicaine. La bataille de l’opinion sera déterminante pour faire aboutir ce projet emblématique.