La Cour des comptes tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur la gestion des prestations sociales en France.
Dans un rapport publié ce vendredi 16 mai, elle révèle que plus de 6 milliards d’euros ont été versés à tort – ou n’ont jamais été versés aux ayants droit – par la branche famille de la Sécurité sociale. Des erreurs massives, souvent liées aux déclarations des allocataires, qui fragilisent la confiance dans le système social français.
C’est un chiffre qui fait froid dans le dos : 6,3 milliards d’euros. Selon la Cour des comptes, c’est le montant estimé des erreurs « non corrigées » enregistrées à la fin de l’année 2024 par la branche famille de la Sécurité sociale. Cela représente 8 % du total des prestations versées, un taux que la Cour juge « particulièrement élevé ».
Ces erreurs sont de deux ordres : des versements indus d’un côté, et des aides non versées de l’autre. Autrement dit, des bénéficiaires ont perçu de l’argent auquel ils n’avaient pas droit, pendant que d’autres – parfois en grande précarité – n’ont tout simplement pas reçu l’aide qui leur était due.
Les prestations les plus touchées
Le RSA, la prime d’activité et les aides au logement sont les prestations les plus concernées. La Cour souligne en particulier la situation alarmante de la prime d’activité : plus d’un quart des montants versés seraient entachés d’erreurs.
Face à cette situation, la Cour se dit incapable de certifier les comptes de la Caisse nationale d’allocations familiales (Cnaf) pour l’année 2024, comme elle l’avait déjà refusé en 2022 et 2023. Un signal fort qui remet en question la fiabilité du pilotage de cette branche essentielle de la solidarité nationale.
La déclaration de ressources en cause
Comment expliquer de tels dysfonctionnements ? Pour Nicolas Grivel, directeur général de la Cnaf, la responsabilité incombe en grande partie aux erreurs commises par les allocataires eux-mêmes lors du remplissage de leurs déclarations de ressources. Les prestations comme le RSA ou la prime d’activité sont en effet calculées sur la base de revenus récents, que les bénéficiaires doivent déclarer manuellement.
C’est là que le bât blesse. Pour remédier à cette vulnérabilité, le gouvernement a lancé en mars le dispositif de « solidarité à la source », un mécanisme de préremplissage automatique des données, grâce aux informations transmises par l’employeur, France Travail (ex-Pôle Emploi) ou l’Assurance maladie. L’objectif est de limiter les erreurs, intentionnelles ou non, en simplifiant la procédure.
D’autres branches également dans le viseur
La branche famille n’est pas la seule à être épinglée. La Cour des comptes a également relevé des erreurs dans les branches maladie, retraites, autonomie, et accidents du travail. Si elle certifie ces comptes « avec réserves », elle n’en reste pas moins préoccupée.
Pour la branche maladie, les erreurs de règlements de frais de santé ont atteint 3,3 milliards d’euros en 2024, un chiffre en hausse par rapport à 2023. Plus inquiétant encore : « une indemnité journalière sur 15 nouvellement attribuée est erronée », souligne la Cour.
Retraites : des progrès timides, mais des erreurs persistantes
La branche retraite affiche quelques améliorations, mais reste imparfaite. En 2024, une prestation sur 10 attribuée à d’anciens salariés comporte une erreur financière. C’est mieux qu’en 2023 (1 sur 8), mais le niveau reste préoccupant pour une population souvent vulnérable et dépendante de la précision de ces versements.