Peut-on vraiment parler de « bonne mort » ? Une étude internationale vient de donner la parole à ceux qui côtoient la fin de vie au quotidien : les médecins. Et leurs réponses révèlent un rapport singulier à la mort, souvent très différent de celui du grand public.
Conduite par le End-of-Life Care Research Group de l’Université de Gand, l’étude a interrogé 45 médecins en Italie, en Belgique et aux États-Unis. Les spécialistes en soins palliatifs se distinguent : habitués à accompagner les derniers instants, ils ont longuement réfléchi à leurs propres préférences. Les généralistes et autres spécialistes, eux, s’y penchent moins souvent mais finissent, avec l’expérience, par préciser leurs attentes.
Les critères d’une « bonne mort »
Pour ces professionnels, la mort idéale ne s’improvise pas. Elle réunit plusieurs conditions essentielles : pouvoir anticiper la fin, mourir chez soi ou en maison de retraite plutôt qu’à l’hôpital, être entouré de proches, conserver l’esprit clair, préserver sa dignité et ne pas souffrir. La maîtrise de la douleur et la possibilité de dire adieu sont jugées cruciales, tout comme le fait d’avoir mis de l’ordre dans ses affaires afin de soulager ses proches.
Un contraste avec le reste de la population
Les conclusions mettent en lumière un décalage avec les non-médecins. Le grand public reste attaché aux traitements prolongeant la vie, même au prix d’une souffrance supplémentaire. Cette volonté de repousser l’inévitable s’explique par la peur, l’incertitude et parfois le manque de connaissances médicales. Les médecins, eux, refusent davantage l’acharnement thérapeutique, marqués par les situations douloureuses qu’ils observent chez leurs patients.
Une influence culturelle et législative
Les préférences des praticiens varient aussi selon leur pays. En Belgique et aux États-Unis (Wisconsin), où l’aide médicale à mourir est permise ou débattue, elle est souvent perçue comme une option positive. En Italie, en revanche, le sujet demeure plus tabou, freiné par des traditions religieuses et un cadre juridique plus restrictif.
Des soignants plus lucides, mais pas insensibles
L’étude montre que les médecins n’ont pas moins peur de la mort, mais qu’ils veulent en être acteurs, plutôt que de la subir. Leur vision traduit une recherche d’équilibre entre lucidité médicale et humanité : mourir sans douleur, avec autonomie, et dans un environnement qui fait sens.