À presque 91 ans, Pierre Richard a fait vibrer le cœur du Festival de Cannes. Ému, fragile mais digne, le comédien-réalisateur est venu présenter son nouveau film, trente ans après sa dernière mise en scène. Une soirée placée sous le signe de la tendresse, du cinéma… et de l’amour.
Ce jeudi 22 mai 2025, tous les regards se sont tournés vers lui : Pierre Richard, silhouette familière du cinéma français, est monté les marches du Festival de Cannes avec une dignité bouleversante. Âgé de 90 ans, affaibli mais souriant, l’acteur a fait une entrée remarquée sur le tapis rouge, main dans la main avec son épouse, la comédienne et productrice brésilienne Ceyla Lacerda.
Complice et visiblement ému, le couple a offert une image de grâce et de force discrète. Pierre Richard, légèrement amaigri, a été assisté d’une chaise installée par l’organisation, et a salué avec pudeur les photographes et le public. Une séquence pleine d’humanité, sans mise en scène, sans artifices.
Un film profondément personnel
S’il était là ce soir-là, c’était pour présenter un film très spécial : L’Homme qui a vu l’ours qui a vu l’homme, projeté en séance spéciale dans la salle Agnès Varda. Un film qu’il a écrit et réalisé, près de trente ans après sa dernière mise en scène. Un événement rare pour Cannes, où les comédies, surtout françaises, peinent à se faire une place dans les sélections.
“C’est différent, parce que c’est mon film”, a-t-il confié dans une interview à L’Indépendant. “Ce n’est pas souvent qu’on choisit les comédies pour les festivals comme Cannes.” Cette œuvre, tournée dans l’Aude entre Gruissan et Armissan, raconte une amitié inattendue autour d’un ours échappé d’un cirque. Une histoire à hauteur d’homme, empreinte de poésie et de regard tendre sur le monde.
Une comédie… et une déclaration d’amour au cinéma
Pour Pierre Richard, ce film est bien plus qu’un retour à la réalisation. C’est une déclaration d’amour au cinéma populaire, aux territoires oubliés, aux acteurs vrais. “Je voulais éviter l’accent simulé des Parisiens”, glisse-t-il malicieusement, expliquant son choix de travailler avec des comédiens occitans comme Jean-Claude Baudracco.
Malgré sa fatigue, Pierre Richard a tenu à venir présenter lui-même le film à Cannes. Sur scène, il a pris brièvement la parole, la voix tremblante, mais ferme. “Je l’aurais aimé de toute façon, même sans Cannes. Mais le voir ici… c’est une fierté, pour moi et toute l’équipe.” Puis il s’est effacé, laissant le film parler pour lui.
Un symbole de fidélité et de transmission
L’émotion, ce soir-là, n’était pas feinte. Il y avait dans cette montée des marches quelque chose de plus fort que le simple retour d’un artiste. C’était le salut d’un monument à son art, à ses choix, à sa génération. Un adieu en douceur, peut-être, ou simplement un dernier geste de gratitude envers le public et le cinéma.
Et dans son ombre discrète mais essentielle, Ceyla Lacerda. Présente, attentionnée, toujours à ses côtés. Leur complicité, palpable, a donné une autre dimension à cette apparition : celle d’un amour fidèle, patient, solide. Comme si elle portait avec lui ce moment si particulier, entre lumière et crépuscule.
Pierre Richard, éternel tendre
À quelques mois de son 91e anniversaire, Pierre Richard ne cherche plus à briller. Il veut transmettre, raconter, toucher. L’Homme qui a vu l’ours qui a vu l’homme est peut-être son dernier film, mais sûrement l’un des plus sincères. Une œuvre modeste dans sa forme, mais immense dans son geste.
Et ce jeudi soir, sur la Croisette, le public n’a pas seulement applaudi un film. Il a salué un parcours, une élégance, une fidélité à une certaine idée du cinéma, celle qui ne triche pas, qui fait rire sans blesser, qui émeut sans forcer.