Bruno Retailleau frappe fort sur l’un de ses thèmes favoris : l’immigration clandestine. En mobilisant des milliers de forces de l’ordre pour des contrôles massifs dans tout le pays, le ministre de l’Intérieur affiche une volonté politique claire, entre fermeté assumée et stratégie de communication sécuritaire.
Ce mercredi matin, Bruno Retailleau a lancé une vaste opération de contrôle contre l’immigration illégale sur l’ensemble du territoire. L’initiative, prévue pour durer 48 heures, mobilise quelque 4 000 agents — policiers, gendarmes, douaniers, mais aussi militaires de l’opération Sentinelle — dans les gares, les bus et aux frontières. Selon le ministre, l’objectif est clair : renforcer la lutte contre les étrangers en situation irrégulière (ESI) et affirmer une politique de « tolérance zéro ».
« Les clandestins ne sont pas les bienvenus en France, et je le dis de façon la plus ferme et définitive », a martelé Bruno Retailleau sur les antennes de CNews et Europe 1. Un discours sans nuance, porté à la fois par son poste de ministre de l’Intérieur et par son ancrage politique à droite, en tant que figure majeure des Républicains.
Des contrôles dans les gares, les bus et aux frontières
Selon une note interne consultée par l’AFP, les préfets ont reçu l’instruction d’organiser des contrôles ciblés sur les trains à destination des pays limitrophes et des grandes villes françaises, tant à l’arrivée qu’au départ. Il s’agit, selon le ministre, d’une « opération nationale de contrôle des flux », qui s’inscrit dans la continuité d’une campagne menée les 20 et 21 mai derniers. Cette dernière avait permis l’interpellation de plus de 750 personnes.
La note fait également état d’une hausse de 28 % des interceptions d’ESI ces dernières semaines, un chiffre mis en avant par Retailleau pour justifier une intensification des efforts. Ces données, bien que brutes, traduisent une orientation politique davantage centrée sur la traque que sur la gestion administrative ou humanitaire des situations migratoires.
Une stratégie sécuritaire assumée
Retailleau ne cache pas que cette opération a aussi une valeur symbolique. En se rendant en personne à la gare du Nord, haut lieu de passage et d’activité migratoire, il met en scène la présence de l’État sur un sujet devenu hyper sensible dans le débat public. C’est un message de fermeté adressé aux électeurs, mais aussi un signal diplomatique envoyé aux pays voisins : la France entend contrôler plus strictement ses entrées, quitte à réintroduire un contrôle renforcé aux frontières.
« Nous avons réintroduit des contrôles beaucoup plus serrés qu’auparavant », a-t-il déclaré, évoquant la création d’une « force frontière » composée de forces mixtes : policiers, gendarmes, douaniers et militaires. Une configuration qui rappelle les mécanismes mis en place à l’époque des attentats ou durant la crise migratoire de 2015.
Un discours qui divise
La déclaration de Retailleau intervient dans un contexte politique chargé, où les questions migratoires nourrissent la polarisation du débat. Si une partie de l’opinion publique salue cette démonstration d’autorité, d’autres y voient une politique répressive, inefficace sur le long terme, et détachée de la complexité des réalités migratoires. Des ONG et juristes dénoncent régulièrement le caractère arbitraire et parfois discriminatoire de ces contrôles, ainsi que leur efficacité contestable face aux filières d’entrée clandestine.
Par ailleurs, les chiffres avancés — 47 000 interpellations depuis janvier — soulèvent des questions : combien ont débouché sur des reconduites à la frontière ? Combien ont été contestées devant les tribunaux ? Le ministère ne détaille pas ces données, préférant mettre l’accent sur le volume et la fréquence des opérations.
Une ligne politique alignée sur la droite dure
Avec cette initiative, Bruno Retailleau confirme sa volonté d’imprimer sa marque sur l’agenda sécuritaire et migratoire du gouvernement. Longtemps considéré comme une figure idéologique de la droite conservatrice, il transpose aujourd’hui ses convictions dans l’appareil régalien. Son discours de fermeté résonne avec celui d’une frange de la population en demande de clarté et d’action, mais risque aussi d’alimenter les clivages politiques et sociaux autour de la question migratoire.