Face à une situation brûlante en Nouvelle-Calédonie, Manuel Valls a tenté d’apaiser les tensions tout en assumant un passé critique envers le chef de l’État.
Mais sur le plateau de BFMTV, Apolline de Malherbe ne lui a rien laissé passer, le confrontant à ses propres mots désormais devenus embarrassants. Jeudi 5 juin, l’entretien entre Apolline de Malherbe et Manuel Valls a pris des allures de règlement de comptes politique. Invité sur le plateau de BFMTV dans le Face à Face, le ministre des Outre-mer s’est exprimé sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, au cœur de fortes tensions. Le territoire ultramarin, secoué par des mouvements de contestation et des débats sur son autonomie, polarise depuis plusieurs semaines le débat national.
Interrogé sur une éventuelle indépendance, Manuel Valls n’a pas mâché ses mots : « L’indépendance sèche, sans aucun lien avec la France, n’aurait aucun sens. » Une déclaration ferme, qui trace une ligne claire, alors que les négociations entre les indépendantistes et loyalistes patinent.
Une séquence tendue : Apolline de Malherbe dégaine ses archives
Mais c’est dans un second temps que l’interview a pris un tour plus incisif. Apolline de Malherbe, fidèle à sa réputation de journaliste sans concessions, a confronté le ministre à ses propres propos, tenus il y a quelques mois seulement.
« Vous pensez toujours qu’Emmanuel Macron a mis à terre 36 années de dialogue et de progrès, qu’il a torpillé par un entêtement imbécile, irresponsable et criminel ces accords ? » lance-t-elle, en citant texto une déclaration de Manuel Valls… avant sa nomination. Un extrait gênant, d’autant plus que Valls occupe aujourd’hui un portefeuille directement lié à la Nouvelle-Calédonie.
Pris au dépourvu mais gardant son calme, le ministre tente de désamorcer : « Je vois que vous cherchez la crise dans les ménages. » Une pirouette verbale, suivie d’une explication plus sérieuse : « J’ai été nommé par Emmanuel Macron en toute connaissance de mes prises de position. »
De critique acerbe à ministre loyal : un virage assumé
Ce changement de posture, Manuel Valls l’assume, mais le justifie par les responsabilités nouvelles qui lui incombent. Il affirme ne pas être là pour « refaire l’année écoulée », mais pour trouver « les bonnes solutions ». Sans répondre directement à la relance d’Apolline de Malherbe sur le supposé « entêtement criminel » du président, il préfère botter en touche, insistant sur sa volonté d’apaisement.
« Chacun sait, le président de la République comme François Bayrou, que je n’entre pas au gouvernement pour régler mes comptes », déclare-t-il, préférant parler d’avenir plutôt que de ses critiques passées. Un positionnement politique délicat, entre fidélité gouvernementale et cohérence personnelle.
Le dossier calédonien, un test pour le nouveau ministre
Manuel Valls joue gros. Sa nomination, survenue fin 2024 à la suite de tensions prolongées en Nouvelle-Calédonie, l’oblige à apaiser un territoire où les blessures coloniales et les débats identitaires restent vifs. Le président Emmanuel Macron a annoncé de futures consultations, et Valls aura la lourde tâche de relancer un dialogue aujourd’hui fortement compromis.
Mais la question demeure : comment un homme ayant qualifié les décisions du chef de l’État de « criminelles » peut-il incarner désormais la solution ? Pour l’opinion publique comme pour les observateurs politiques, cette contradiction fragilise sa parole, malgré ses efforts pour se montrer rassembleur.
En assumant à demi-mot ses propos passés tout en affirmant sa loyauté actuelle, Manuel Valls tente une acrobatie politique risquée. Une manœuvre qui pourrait, si elle échoue, le placer dans une impasse.