Mme Bescond a refoulé les souvenirs traumatisants, qui sont revenus progressivement sous forme de flash-backs.
Elle a accusé son violeur à l’âge de 21 ans, qui a été condamné à dix ans de prison. Mme Bescond a ensuite mené une brillante carrière – en 2017, elle a été nommée chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. Toutefois, en plus de chorégraphier et de danser, elle s’engage à faire évoluer la législation française, qu’elle juge trop laxiste.
« La France connaît un tel retard en matière de maltraitance des enfants : 81% des infractions sexuelles contre les mineurs se produisent à leur domicile, et la loi actuelle ne les protège pas. Beaucoup trop d’avocats défendent l’indéfendable juste pour l’argent, et la loi est bizarrement pleine de failles et de clauses dérogatoires, notamment lorsqu’il n’y a pas de violence physique. »
Le spectacle Les Chatouilles raconte l’histoire d’Odette, enfant violée par un ami de la famille, et son cheminement à travers la culpabilité, l’auto-accusation, la colère et la douleur qui s’ensuivent, jusqu’à la rédemption.
» Jouer ce spectacle est un salut pour moi. Quand je l’ai écrit, tout cela brûlait dans ma tête et dans mon cœur, et mettre toute cette colère et cette douleur à l’extérieur, écrire tout cela, et se concentrer dessus, le développer en un véritable spectacle a été cathartique. »
« Elles ont aussi vécu cela. »
Selon les critiques, le spectacle est techniquement brillant, drôle et touchant. Elle a remporté le Molière, le prix national du théâtre en France, pour le meilleur spectacle solo en 2016.
» Chaque fois que je le joue, des gens m’abordent après coup et me disent qu’ils ont aussi vécu ça. Ça a été difficile à entendre. Mes pages sur les médias sociaux sont encombrées de victimes. Les abus sur les enfants sont omniprésents. Je n’en avais aucune idée. Je pensais qu’il n’y avait que moi. Mais des personnes de tous les milieux, de tous les endroits, de tous les âges me disent qu’elles ont aussi vécu cela. »
« Je suis allée voir des psys, je fais du yoga, du sport… Mais j’en ai marre qu’on trouve toujours des excuses aux agresseurs et qu’on puisse lire encore ‘ivre, il tue sa femme’. Personnellement, je pourrais boire quatre bouteilles de rhum, je ne tuerai jamais personne » Elle ajoute.
Dans une interview avec le magazine Paris Match, disponible en kiosque ce jeudi 5 janvier, Mme Bescond avoue : « J’ai fantasmé un nombre illimité de fois la façon dont je pouvais tuer cet homme qui m’a violée à 9 ans. J’ai tout fait : je l’ai éviscéré, dépecé… Dans la réalité, je pourrais le faire en deux secondes et demie, comme ça, les doigts plantés dans les yeux. Sauf que la violence, c’est de la fainéantise »