Invité de marque sur France Inter, le philosophe André Comte-Sponville a livré un entretien intime et sans fard au micro de Léa Salamé.
Entre réflexions existentielles, confidence inattendue sur sa santé, et plaidoyer en faveur d’un droit à mourir dans la dignité, l’écrivain dévoile un pan personnel de sa pensée, en lien direct avec son dernier ouvrage.
Une confidence inattendue sur un accident vasculaire cérébral
Au cœur de l’interview du 9h20, André Comte-Sponville a surpris par une révélation personnelle inattendue : il a été victime d’un AVC il y a trois ans. Sans séquelle apparente, l’épisode a néanmoins marqué un tournant dans son rapport à la vie. « Qui peut le savoir ? J’ai eu un AVC », a-t-il confié calmement, face à une Léa Salamé visiblement interloquée.
Le philosophe de 72 ans, connu pour sa lucidité et sa retenue, évoque peu souvent sa santé dans les médias. Cette confidence prend donc un relief particulier, d’autant plus qu’elle s’inscrit dans la thématique de son nouveau livre, L’opportunité de vivre : dernières études, où il aborde frontalement les questions de la finitude, de la souffrance, et de la mort.
Un rapport à la mort assumé et réfléchi
André Comte-Sponville, fidèle à sa pensée humaniste, ne dramatise pas la mort mais la pense comme une composante inévitable et, parfois, libératrice. Il affirme : « J’aime la vie, et j’espère ne pas avoir besoin de me suicider », avant de préciser : « Mais si un jour je suis tellement malade, tellement handicapé, tellement souffrant, que la mort me paraît préférable, je réclame le droit de finir. »
Ces mots forts résonnent dans un contexte où le débat sur la fin de vie refait surface à l’Assemblée nationale. Pour le philosophe, cette réflexion ne relève pas de la provocation, mais d’une exigence éthique et humanitaire. Il défend le droit pour chacun, dans certaines conditions, de choisir la manière dont il souhaite terminer sa vie.
Une prise de position claire sur l’aide à mourir
Alors que le gouvernement prépare un projet de loi en deux volets – l’un sur les soins palliatifs, l’autre sur l’aide à mourir – André Comte-Sponville estime que la législation actuelle est insuffisante et injuste. « Votre médecin n’a pas le droit de vous aider à mourir, même si vous souffrez atrocement d’une maladie incurable », rappelle-t-il sans détour.
Pour lui, il est temps d’adapter le droit à la réalité des souffrances humaines. « Il faut changer la loi », assène-t-il avec la sérénité de celui qui a longuement mûri sa réflexion. Il plaide pour une évolution encadrée mais réelle, respectueuse de la liberté individuelle et du discernement médical.
En s’exprimant avec cette sincérité rare sur sa santé, André Comte-Sponville ne cherche ni compassion ni polémique, mais propose une parole philosophique ancrée dans l’expérience humaine la plus universelle : celle de la finitude. Son livre, à la croisée de l’essai et du témoignage, s’inscrit dans une époque en quête de sens et de repères sur les grandes questions existentielles.