Un rapport accablant met en lumière l’ampleur des défaillances hospitalières en France. Derrière les chiffres, ce sont des vies brisées et un système de santé au bord de la rupture qui se dessinent.

Entre surcharge des soignants, sous-effectifs chroniques et lourdeurs administratives, la Haute Autorité de santé dresse un constat sans appel. En 2024, la Haute Autorité de santé (HAS) a recensé 4 630 événements indésirables graves liés aux soins, dont près de 44 % ont conduit au décès des patients. Fait alarmant, la moitié de ces accidents ont été jugés « évitables » ou « probablement évitables ». Les erreurs de diagnostic, les fautes médicamenteuses, les défaillances de matériel ou encore des actes d’auto-agression du patient figurent parmi les causes les plus fréquentes.
Quand les soignants travaillent à flux tendu
Le rapport souligne que 58 % de ces drames surviennent en période de fragilité organisationnelle : nuits, week-ends ou vacances. Le manque d’effectifs, l’épuisement des équipes et le recours accru à du personnel temporaire, peu familier des procédures locales, créent un terrain propice aux erreurs. Comme le rappelle la HAS, ces conditions ne sont pas anecdotiques : elles sont au cœur des risques.
Une sous-déclaration massive des incidents

Pour le Dr Gérald Kierzek, médecin urgentiste, la hausse des signalements traduit surtout une meilleure culture du signalement, mais la réalité est bien plus sombre : « La sous-déclaration reste massive ». Seule une petite partie des événements est effectivement notifiée, ce qui minore artificiellement l’ampleur du problème et empêche une analyse complète.
Les vraies causes : l’organisation, pas la compétence
Selon le praticien, les erreurs sont rarement liées à un manque de savoir-faire, mais bien à l’environnement de travail : surcharge, communication défaillante, turn-over permanent. Multiplier les postes administratifs de contrôle ne résout rien, estime-t-il : « Cela accroît la bureaucratie sans améliorer la sécurité des patients ». Pour lui, l’avenir repose sur la formation continue, la transparence et le retour d’expérience des équipes soignantes.
Un système hospitalier à bout de souffle
Le constat du Dr Kierzek est sans appel : « Notre système hospitalier est à l’os ». La concentration des établissements, les fermetures de lits et la logique de rentabilité ont transformé les hôpitaux en « usines à malades », générant toujours plus de risques pour les patients. La solution ? Revenir à un modèle de proximité, avec des équipes stables, soudées et motivées, loin des logiques purement comptables.
Enfin, le médecin s’indigne face aux discours gouvernementaux sur les dépenses publiques : « L’argent investi dans l’hôpital existe, mais il est mal orienté ». Selon lui, trop de moyens sont confiés à une gestion administrative éloignée du terrain, qui multiplie les contrôles et audits sans améliorer la qualité des soins. « Toujours plus avec toujours moins… à force, tout finit par céder », conclut-il, appelant à redonner du souffle aux soignants plutôt qu’à la bureaucratie.










