Elle a appelé à l’aide neuf fois, en vain. Sylvia, 43 ans, mère de deux enfants, est morte dans la nuit, seule sur son balcon à Martigues, après avoir supplié les secours pendant des heures.
Ce drame d’une cruauté inouïe, survenu en août 2025, met à nu une double faillite : celle d’un homme violent et celle d’un système de secours qui n’a pas su sauver une vie qu’il aurait pu préserver.
Le soir du drame, Sylvia subit un passage à tabac brutal de la part de son compagnon, Samir M., aujourd’hui mis en examen pour violences mortelles. Les voisins entendent des cris, mais lorsqu’ils arrivent, l’homme a pris la fuite. La quadragénaire, en état de choc, se plaint de douleurs au ventre et à la tête. Les pompiers interviennent rapidement. Elle leur explique avoir été battue, mais refuse le transport à l’hôpital, préférant porter plainte le lendemain. Une décision tragique.
Dans les heures qui suivent, son état se dégrade à cause d’une hémorragie interne provoquée par l’éclatement de la rate. Prise de douleurs insoutenables, elle appelle à nouveau les secours. Ses derniers mots, rapportés par sa mère, résonnent comme un cri : “Elle disait qu’elle se faisait dessus, qu’elle était en train de mourir.” Pourtant, personne ne viendra la sauver.
Neuf appels à l’aide, aucune réponse adaptée
Les enregistrements des appels au 18 sont insoutenables. Neuf appels en quatre heures, selon l’enquête du Figaro, et une succession d’erreurs, de jugements hâtifs et de mépris glaçant.
Dès le premier appel, l’opérateur du SDIS 13 doute de sa sincérité : “Vous plaisantez ?”, lui lance-t-il, avant d’ajouter, cynique, qu’il “fallait y penser avant”. Lorsqu’elle rappelle, il se montre plus dur encore : “Il va falloir arrêter d’appeler. Vous croyez qu’on est des taxis ?”
Transférée vers le Samu, la victime est mise en attente pendant plus d’une heure avant de tomber sur un médecin. Ce dernier lui conseille… de “prendre un taxi” ou “d’appeler quelqu’un pour l’emmener aux urgences”, avant de lui raccrocher au nez. Pendant ce temps, Sylvia se vide de son sang.
Pire encore, l’opérateur du SDIS 13 transmet un message erroné au Samu, prétendant que la quadragénaire souffre de troubles psychiatriques. Le ton du personnel médical devient alors condescendant : “Vous allez mourir parce que vous vous faites dessus ? D’accord… Je pense que vous avez un problème, madame. Il va falloir voir un psychiatre.” Quelques heures plus tard, une voisine retrouvera le corps sans vie de Sylvia, recroquevillé sur son balcon.
Une double tragédie : la violence et la négligence
Le lendemain, l’onde de choc s’étend à toute la région. Samir M. est interpellé et mis en examen pour “violence ayant entraîné la mort sans intention de la donner”. Mais une seconde enquête s’ouvre, tout aussi accablante : une information judiciaire contre X pour “non-assistance à personne en danger”.
“Ma sœur s’est fait fracasser par un malade, mais elle aurait pu être sauvée. Les pompiers, le Samu et la police n’ont pas fait leur travail”, accuse son frère, effondré. Pour la famille, la colère se mêle à l’incompréhension : comment un tel enchaînement de dysfonctionnements a-t-il pu se produire ?
Une affaire qui ébranle le système de secours
Le cas de Sylvia, symbole d’un dysfonctionnement institutionnel majeur, soulève des questions brûlantes. Pourquoi les secours ont-ils refusé de revenir ? Pourquoi l’urgence vitale n’a-t-elle pas été reconnue ? Pourquoi, enfin, la détresse d’une femme battue a-t-elle été minimisée jusqu’à l’irréparable ?
Le parquet d’Aix-en-Provence a ouvert une enquête administrative interne visant le SDIS 13 et le Samu, afin de déterminer les responsabilités précises. “Chaque minute a compté”, confie une source proche du dossier, “et chacune d’elles aurait pu sauver Sylvia.”
Pour ses proches, l’image est insupportable : une mère de famille qui meurt seule, incomprise et abandonnée. Son père, Pierre, l’avait redouté : il craignait pour sa sécurité, même s’il n’avait jamais été témoin de violences physiques. Ces craintes se sont tragiquement confirmées.
Dans un silence lourd, sa mère résume l’horreur : “Elle s’est retrouvée seule, et elle s’est vue mourir.”