La chute de François Bayrou n’aura surpris personne. En choisissant de se soumettre au vote de confiance de l’Assemblée nationale, le Premier ministre savait qu’il jouait son va-tout.
Après 270 jours passés à Matignon, il quitte le pouvoir, devenant le sixième chef du gouvernement à échouer sous la présidence d’Emmanuel Macron. Arrivé après la motion de censure qui avait emporté Michel Barnier, François Bayrou n’aura pas résisté à l’instabilité chronique née de la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024. Son mandat, long de neuf mois, illustre la fragilité d’un exécutif incapable de s’assurer une majorité solide. Si Bayrou ne détient pas le record du plus court passage à Matignon, il rejoint néanmoins la liste des Premiers ministres éphémères qui se sont heurtés au mur parlementaire.
Michel Barnier, un mandat encore plus court
Avant Bayrou, Michel Barnier avait tenté l’impossible : réunir une coalition élargie autour du président. En vain. Son gouvernement n’aura duré que 90 jours, un record de brièveté dans l’histoire de la Ve République. Ce chiffre, trois fois inférieur à la durée de Bayrou, illustre la volatilité politique actuelle, loin de la stabilité incarnée jadis par des figures comme Georges Pompidou, resté Premier ministre plus de 2 200 jours.
Une présidence marquée par l’instabilité
Depuis 2017, Emmanuel Macron a nommé six Premiers ministres : Édouard Philippe (1 145 jours), Jean Castex (682 jours), Élisabeth Borne (603 jours), Gabriel Attal (240 jours), Michel Barnier (90 jours) et François Bayrou (270 jours). Une rotation rapide qui témoigne de l’incapacité de l’exécutif à installer durablement une ligne politique claire. Malgré ses tentatives de jouer la carte du centrisme, le président de la République se heurte à des blocages permanents et à une opinion publique de plus en plus désabusée.
Des Français de plus en plus méfiants
Au-delà des chiffres, cette succession éclair de Premiers ministres interroge sur la confiance des citoyens envers leurs dirigeants. Les électeurs perçoivent ces nominations comme des compromis tactiques entre camps politiques aux alliances fragiles, plutôt que comme de véritables choix de projet. Une situation qui nourrit la défiance et fragilise encore davantage les institutions.
Quelles leçons pour Emmanuel Macron ?
Avec la démission de François Bayrou, le chef de l’État doit une nouvelle fois se réinventer. La question reste entière : optera-t-il pour un énième compromis au centre ou pour un véritable tournant politique ? Dans un paysage fragmenté, marqué par la poussée des extrêmes, chaque choix risque d’être perçu comme une manœuvre davantage que comme une réponse aux attentes des Français. Le défi est immense, car au-delà des jeux d’appareil, c’est l’avenir même du modèle politique actuel qui est en question.