Dans les salons feutrés de l’Élysée, un parfum de crise politique flotte. En ce 2 septembre, Emmanuel Macron tente une ultime manœuvre pour sauver son gouvernement menacé.

Autour de la table, ses alliés politiques — François Bayrou, Gabriel Attal, Édouard Philippe et Bruno Retailleau — scrutent l’avenir incertain d’une majorité au bord de la rupture. Ce déjeuner du 2 septembre, organisé à la hâte, avait tout d’un conseil de guerre politique. François Bayrou, affaibli mais toujours influent, arrive le visage fermé. Il sait que ses jours à Matignon sont comptés. Le président, lui, espère encore conjurer l’inévitable chute du gouvernement. Selon un conseiller de l’Élysée, « le ton était grave, les échanges francs, parfois durs ». Emmanuel Macron voulait sonder ses alliés sur deux hypothèses : un accord élargi avec la gauche modérée, ou, à défaut, la dissolution de l’Assemblée nationale.
L’idée d’une coalition élargie… et les réticences qu’elle suscite

Le chef de l’État évoque la possibilité d’un rapprochement avec les socialistes, dans l’espoir de reconstituer une majorité stable autour d’une “coalition de responsabilité”. Mais l’idée rencontre un accueil glacial. Gabriel Attal, à la tête du parti Renaissance, redoute un effondrement de l’électorat centriste. Édouard Philippe, prudent, rappelle que toute alliance avec la gauche « brouillerait définitivement la ligne politique » du macronisme. Quant à Bruno Retailleau, représentant de la droite républicaine, il balaie la proposition d’un revers de main : « Ce serait une reddition, pas une ouverture. »
Le président prend note, sans insister. L’hypothèse d’une dissolution surgit alors dans la discussion, presque comme un aveu d’impuissance. Mais là encore, aucun des convives ne la juge viable. « Dissoudre maintenant, ce serait donner le pouvoir à Marine Le Pen », lâche Édouard Philippe, visiblement irrité.
Le nom d’un successeur pour “sortir de l’ornière”

C’est à ce moment précis que François Bayrou, jusque-là silencieux, propose un nom pour assurer la transition et apaiser les tensions au sein de la coalition. Le Palois, conscient de sa propre fragilité, suggère une figure capable de rétablir la confiance tout en incarnant une forme de continuité : Sébastien Lecornu. Ministre respecté et pragmatique, il apparaît, selon Bayrou, comme « l’un des rares à pouvoir tenir les deux bouts — la loyauté à Macron et la main tendue aux Républicains ». Emmanuel Macron, d’abord réservé, se montre attentif. Quelques jours plus tard, il confirmera ce choix.
Un dernier acte avant la chute
Mais la manœuvre n’aura fait que retarder l’inévitable. Le 8 septembre, le gouvernement Bayrou tombe, emporté par l’absence de majorité et la lassitude du Parlement. Lecornu est alors désigné Premier ministre, symbole d’un compromis bancal et d’un exécutif déjà fragilisé. L’épisode du déjeuner à l’Élysée, resté longtemps confidentiel, éclaire aujourd’hui les tensions internes qui minaient la coalition depuis des mois : un président isolé, un Premier ministre condamné et des alliés divisés sur la direction à prendre.










