Dans une ville où des dizaines de milliers de demandes de logements sociaux restent en attente, chaque appartement détourné de son usage soulève une vive controverse.
Un récent jugement parisien illustre la fermeté des juges face aux locataires qui transforment ces biens en résidences secondaires ou en sources de profit. L’affaire concerne une locataire parisienne de la Régie immobilière de la Ville de Paris (RIVP), qui, après sa retraite en 2022, avait reconnu être « moins présente » dans son deux-pièces. Préférant de longs séjours auprès de sa sœur âgée, elle n’occupait son appartement qu’« en coup de vent ». Mais la loi est explicite : un logement social doit être habité au moins huit mois par an pour conserver son statut de résidence principale. Selon la RIVP, le bien n’était plus réellement occupé depuis 2020.
Une enquête minutieuse pour prouver le manquement
Pour étayer sa demande de résiliation, la régie a mandaté un commissaire de justice, qui a dressé un procès-verbal en mars 2024. Parmi les éléments relevés : un réfrigérateur débranché, une cuvette de toilettes vide d’eau et le témoignage d’un voisin affirmant n’avoir pas vu la locataire « depuis deux ans ».
Ces indices concordants ont convaincu le tribunal que l’appartement ne servait plus de résidence principale. La défense a tenté de faire valoir une manœuvre destinée à récupérer le bien en vue de travaux, exigeant un relogement équivalent et une astreinte financière de 500 euros par jour de retard.
Une décision exemplaire et un délai réduit
Le tribunal judiciaire de Paris a tranché fermement : le bail a été résilié et l’expulsion ordonnée dans un délai exceptionnellement court de quinze jours – bien inférieur aux deux mois habituels. Dans sa décision, le juge a rappelé un principe fondamental : « Un logement social ne peut servir de résidence secondaire, compte tenu de la nécessité d’assurer un logement principal à ceux qui en ont besoin. » Cette rapidité vise à permettre une réattribution sans délai à une famille répondant aux critères sociaux.
Des précédents qui confirment la vigilance de la justice
Cette affaire s’ajoute à d’autres dossiers similaires. Paris a déjà sanctionné des locataires transformant des logements sociaux en locations Airbnb, comme ce bien de Paris Habitat proposé à 255 € la nuit dans le 16ᵉ arrondissement. La locataire, affirmant ignorer l’illégalité de la pratique, a non seulement perdu son bail mais a aussi été contrainte de reverser les bénéfices perçus. Dans un autre cas, un locataire a subi la même sanction pour exploitation commerciale illégale.
Un message clair : préserver l’accès équitable aux HLM
Ces décisions envoient un signal fort aux locataires et aux bailleurs : les logements sociaux doivent rester réservés aux foyers qui en ont réellement besoin. Dans un contexte de tension extrême sur le parc immobilier parisien, la justice entend décourager toute tentative de détournement, qu’il s’agisse d’un pied-à-terre ou d’une activité lucrative. Une fermeté qui vise à garantir que chaque appartement vacant soit réattribué rapidement à ceux qui attendent un toit.