Depuis dix ans, deux hommes veillent dans l’ombre d’un monument de la chanson française. Pierre et Bloodi, compagnons fidèles de Renaud, l’ont soutenu dans ses dérives comme dans ses renaissances.
Témoins d’une vie d’excès et de résilience, ils incarnent l’amitié brute, celle qui ne lâche jamais la main, même dans l’obscurité.
Depuis 2015, Pierre et Bloodi accompagnent Renaud au quotidien, dans ses tournées, ses pauses, ses rechutes et ses résurrections. Ces deux fans devenus proches collaborateurs ont rejoint le chanteur à une période critique de sa vie, marquée par la rupture avec Romane Serda et une santé déclinante. “Il n’était plus en forme du tout. Jamais je n’aurais imaginé qu’il referait un album”, confie Pierre dans Le Parisien.
Pourtant, contre toute attente, Renaud s’est relevé. Il ne boit plus depuis quatre ans, un sevrage inattendu pour un homme que l’on disait au bord du gouffre. Sa résilience étonne même ses plus proches. “Il peut descendre très bas, mais il a une force en lui…”, ajoute Pierre, admiratif. À leurs yeux, cette capacité à renaître n’a rien de miraculeux : c’est le résultat d’un combat de chaque jour.
Des excès qui auraient pu lui coûter la vie
Bloodi, l’autre pilier de cette garde rapprochée, n’élude pas les heures sombres. Le Renaud qu’il décrit est un survivant. “Avec les excès d’alcool et les quatre paquets de clopes par jour, je suis étonné qu’il soit encore là”, lâche-t-il, lucide. Le chanteur lui-même reconnaît avoir frôlé la mort à plusieurs reprises. Et sans le soutien vigilant de ces deux hommes, peut-être n’aurait-il pas tenu.
“On lui a évité la mort plusieurs fois”, affirme Bloodi. Une phrase lourde de sens, qui illustre l’intensité de la relation qu’ils entretiennent avec l’artiste. Leur rôle ne se limite plus à celui d’assistants ou d’amis : ils sont devenus ses gardiens, ses boucliers, ses repères.
L’envie d’abandonner… mais jamais jusqu’au bout
Ces dix années n’ont pas été un long fleuve tranquille. Pierre et Bloodi ont connu le découragement, la lassitude, parfois même l’envie de tout arrêter. “Ça a été dur, parfois on en avait marre”, admet Pierre. Mais il y a chez Renaud quelque chose qui désarme : une fragilité, une humanité brute, un charme écorché.
“Il est hypertouchant. On n’a pas envie de l’abandonner”, résume Pierre. Même quand les rechutes surviennent, même quand l’épuisement guette. Leur fidélité s’enracine dans une affection sincère, tissée de souvenirs partagés et de silences pleins de sens. Bloodi ajoute : “Parfois, il nous a eus à l’usure, notamment quand il rechutait.” Mais ils sont restés, parce qu’ils savent que sans eux, le chanteur serait sans défense.
Protéger un homme trop généreux
Renaud, malgré ses années et ses cicatrices, conserve une générosité intacte. Et c’est parfois cette qualité qui le rend vulnérable. “Il pourrait donner sa chemise à un riche”, ironise Bloodi. Une image forte pour illustrer combien l’artiste peut être naïf face aux profiteurs, attirés par sa notoriété ou sa bonté désarmante.
Leur mission, au-delà du soutien logistique ou affectif, est devenue une protection contre les abus. Dans l’intimité comme dans la sphère publique, ils veillent à ce que personne ne vienne tirer profit de la gentillesse de celui qui a chanté Mistral gagnant. Ils sont là pour éviter qu’on ne l’épuise, qu’on ne le trahisse encore.
Une amitié à l’épreuve du temps
Pierre et Bloodi incarnent une forme rare d’engagement humain, celle qui dépasse les contrats et les circonstances. Ils sont devenus indispensables à l’équilibre fragile de Renaud, mais surtout, ils incarnent un lien précieux : celui de la fidélité sans condition. Dans la lumière ou dans l’ombre, leur présence ne faillit pas.
Renaud, artiste cabossé mais debout, doit une part de sa survie à cette fraternité silencieuse. Et dans un monde du spectacle souvent éphémère, cette constance a des allures de miracle. Ce n’est pas seulement un chanteur qu’ils accompagnent : c’est un homme, une âme blessée, un ami qu’ils refusent de laisser tomber.