Souvent méconnu et sous-estimé, le cancer de la thyroïde progresse silencieusement. Cette pathologie, qui touche une glande pourtant minuscule mais essentielle à notre équilibre, gagne du terrain, en particulier chez les jeunes adultes.
Décryptage d’un cancer qui se manifeste par des signes discrets, mais dont le dépistage précoce change tout.
Logée à la base du cou, la glande thyroïde orchestre des fonctions vitales de notre organisme. Par la production d’hormones, elle intervient dans la régulation du métabolisme, de la température corporelle ou encore du rythme cardiaque. Un dérèglement peut provoquer de multiples troubles, allant de la fatigue chronique à des troubles du poids. Et dans les cas les plus graves, un cancer peut s’y développer.
Un cancer qui se développe en silence
Le cancer de la thyroïde survient lorsqu’un groupe de cellules devient anormal et prolifère jusqu’à former une tumeur. Dans de nombreux cas, la maladie ne provoque aucun symptôme manifeste pendant des mois, voire des années, ce qui rend son diagnostic délicat. « Les patients arrivent parfois avec des signes mineurs, confondus avec d’autres affections bénignes », souligne le Dr Hanène Boudabous, oncologue.
Des formes multiples, des pronostics très variables
Il existe plusieurs types de cancers thyroïdiens, dont les issues sont très contrastées. Le plus fréquent, le carcinome papillaire, représente 80 % des cas. Il évolue lentement et répond bien aux traitements. Le carcinome folliculaire, plus rare, affiche lui aussi un bon pronostic. D’autres formes, comme le carcinome médullaire (souvent génétique) ou l’anaplasique, sont plus redoutées pour leur agressivité et leur caractère difficilement traitable.
Des causes encore mal connues
Les origines précises de cette maladie ne sont pas toujours identifiables, mais plusieurs facteurs de risque sont reconnus. L’exposition à des radiations pendant l’enfance, des antécédents familiaux, des maladies thyroïdiennes chroniques ou encore une carence en iode sont autant d’éléments susceptibles de favoriser son apparition. Le cancer médullaire, notamment, peut être héréditaire, ce qui justifie un suivi familial.
Des symptômes trompeurs ou absents
La difficulté majeure réside dans le fait que les symptômes initiaux sont discrets, voire absents. La découverte est souvent fortuite, lors d’un examen médical ou d’une échographie cervicale. Parmi les signes à surveiller figurent une masse dans le cou, un enrouement persistant, une gêne à la déglutition ou une sensation de boule dans la gorge.
Les signaux d’alerte à ne pas ignorer
D’autres manifestations, plus diffuses, doivent également attirer l’attention. Une fatigue inhabituelle, des difficultés respiratoires légères en position allongée ou un gonflement des ganglions peuvent passer inaperçus ou être attribués à tort à d’autres troubles. Parfois, des douleurs inexpliquées dans le cou, une perte de poids rapide ou une gêne respiratoire marquée doivent alerter.
Quand faut-il consulter ?
Il est vivement recommandé de consulter un professionnel de santé dès l’apparition d’une boule au cou persistante, d’une gêne à avaler ou d’un changement durable de la voix. « Une grosseur qui ne disparaît pas après quelques semaines doit systématiquement être examinée », insiste le Dr Boudabous.
Un diagnostic en plusieurs étapes
Le diagnostic repose sur une série d’examens précis. Le médecin commence par palper la thyroïde, puis prescrit une échographie. En cas de suspicion, une cytoponction est réalisée pour analyser les cellules, accompagnée d’un bilan sanguin et, si besoin, d’une imagerie médicale (scanner ou IRM) pour mesurer l’extension de la maladie. L’échographie reste l’examen le plus couramment utilisé pour un repérage précoce.
Des traitements efficaces si le cancer est détecté tôt
La prise en charge du cancer thyroïdien varie selon la nature de la tumeur et son stade d’évolution. Dans la majorité des cas, la chirurgie est incontournable : une lobectomie ou une thyroïdectomie totale permet de retirer tout ou partie de la glande. Elle est souvent suivie d’un traitement à l’iode radioactif pour détruire les cellules résiduelles. Ensuite, une substitution hormonale à base de lévothyroxine est indispensable à vie.
La radiothérapie ou la chimiothérapie ne sont réservées qu’aux formes les plus agressives, comme l’anaplasique. Pour les cancers résistants aux traitements classiques, des thérapies ciblées innovantes peuvent être proposées, notamment dans les centres spécialisés.
Avec un dépistage précoce et une bonne prise en charge, les chances de guérison sont excellentes. « Pour les formes papillaires et folliculaires, la survie à cinq ans dépasse 95 % », rappelle le Dr Boudabous. Même le carcinome médullaire, plus complexe, offre de bons espoirs s’il est détecté tôt. Le seul réel défi reste le carcinome anaplasique, rare mais très agressif, pour lequel les avancées médicales sont encore en cours.