À 47 ans, Audrey Crespo-Mara incarne une certaine idée du journalisme : rigoureux, discret, mais percutant. Longtemps restée dans l’ombre, elle s’est imposée comme une figure incontournable du paysage médiatique, tout en partageant la vie de Thierry Ardisson, jusqu’à sa disparition le 14 juillet 2025. Retour sur une trajectoire marquée par la ténacité, la pudeur et l’exigence.
Formée à Sciences Po Toulouse puis au CFJ, Audrey Crespo-Mara s’est hissée à la force du travail au sommet du journalisme télévisé. Elle fait ses premières armes dans le service public, notamment à France Inter et France 2, avant d’intégrer TF1. C’est là qu’elle se distingue par ses reportages à forte portée sociétale, politique et culturelle. Entre 2007 et 2020, elle multiplie les expériences : LCI, Europe 1, et bien sûr Sept à Huit, où elle signe depuis plusieurs années Le Portrait de la semaine.
Cette séquence est devenue sa signature : un moment suspendu, en musique, à la mise en scène maîtrisée, où la parole de l’invité prend toute la place. Audrey Crespo-Mara s’y efface volontairement, mais impose un cadre exigeant. Son style est sobre, son ton doux, mais la profondeur de ses interviews n’a rien d’innocent.
Une intervieweuse aux règles strictes
Son entretien avec Jade et Joy Hallyday, diffusé en 2023, reste un exemple de cette approche méthodique et respectueuse. Invitée dans l’émission BuzzTV du Figaro, Audrey Crespo-Mara expliquait les coulisses de ce moment rare : « Je voulais recueillir leur parole à elles, pas celle de leur mère », précise-t-elle. Elle rappelle aussi une règle d’or qu’elle applique à toutes ses interviews : la solitude. Pas d’entourage, pas de pression hors champ. Même Laeticia Hallyday, absente par choix – et par nécessité – l’avait compris.
« Je demande toujours à l’entourage de partir. Je veux être seule avec l’invité », affirme-t-elle. Une posture journalistique rare, qui permet une liberté de ton et une sincérité rarement atteinte dans des formats aussi courts. Une démarche qui traduit son attachement profond à l’intégrité de la parole recueillie.
Une journaliste avant d’être “la femme de”
Mariée à Thierry Ardisson depuis 2014, Audrey Crespo-Mara a longtemps été résumée à cette étiquette. Pourtant, sa carrière est largement antérieure à cette union, et c’est avant tout en son nom qu’elle s’est imposée dans le métier. Elle a deux enfants issus d’un précédent mariage avec l’entrepreneur sénégalais Aliou Mara, dont Sékou Mara, devenu footballeur professionnel.
Si sa notoriété a pris une nouvelle dimension aux côtés du célèbre animateur, elle n’a jamais cherché à en tirer un quelconque bénéfice. Leur relation, fusionnelle et pudique, s’est inscrite dans une discrétion rarement observée dans le milieu médiatique.
Une veuve dans la tourmente
La mort de Thierry Ardisson, annoncée le 14 juillet 2025, a bouleversé le monde de la télévision. Mais elle a aussi été source d’un litige médiatique douloureux : le journaliste Clément Garin avait annoncé le décès la veille sur les réseaux sociaux avant de supprimer son message. Audrey Crespo-Mara, indignée par cette précipitation sans fondement, a décidé d’engager des poursuites judiciaires. Pour elle, il s’agit autant de défendre la mémoire de son mari que d’imposer une éthique à un monde numérique trop prompt à piétiner l’intimité.
Une voix singulière dans le paysage audiovisuel
Discrète mais puissante, Audrey Crespo-Mara s’est taillé une place à part dans le journalisme télévisé. Son travail ne fait jamais de bruit inutile, mais il creuse, révèle, interroge. Son exigence, son écoute et sa rigueur en font une intervieweuse respectée, bien au-delà du simple portrait.
Et si la douleur du deuil la ramène aujourd’hui à la lumière d’une manière qu’elle n’aurait jamais choisie, elle poursuit son chemin, fidèle à sa ligne, à son métier, à ce qu’elle incarne : une parole maîtrisée, une présence sans esbroufe, une journaliste avant tout.
