Le débat sur la fiscalité du patrimoine revient au premier plan à l’Assemblée nationale. En votant en première lecture la transformation de l’IFI en « impôt sur la fortune improductive », les députés ont ouvert une controverse majeure.

L’inclusion de certains contrats d’assurance-vie bouleverse un pilier de l’épargne française et inquiète profondément le secteur financier. L’amendement adopté rebat les cartes du système actuel. L’impôt sur la fortune immobilière se verrait élargi à des actifs considérés comme « non générateurs de richesse », parmi lesquels figurent désormais l’or, les œuvres d’art, les voitures de collection ou encore les cryptomonnaies. Mais la mesure qui suscite le plus de remous concerne l’assurance-vie, lorsqu’elle est placée en fonds en euros, réputés plus sécurisés et moins risqués.
Pour les défenseurs du texte, il s’agit d’inciter l’épargne à s’orienter vers des investissements « utiles » à la croissance, notamment les actions ou l’immobilier productif. L’objectif affiché est de stimuler directement l’économie réelle, en orientant le capital des ménages vers les entreprises et les infrastructures. Toutefois, seuls les contrats contenant une part significative de supports dynamiques seraient exemptés de taxation.

L’assurance-vie, un pilier menacé ?
Avec près de 2 000 milliards d’euros d’encours, l’assurance-vie représente le placement favori de millions de Français, apprécié pour sa sécurité et sa fiscalité stable. Les fonds en euros, jugés prudents, constituent souvent la première porte d’entrée des épargnants. Ils financent aussi indirectement l’État et les grands groupes nationaux.
Pour Adrien Couret, directeur général d’Aéma Groupe, l’attaque porte plus loin qu’une simple question technique. Il y voit une remise en cause de la confiance des ménages dans l’épargne longue, fondée sur la stabilité et la prévisibilité. Selon lui, le qualificatif d’« improductif » appliqué aux fonds en euros est non seulement injuste mais trompeur, puisqu’ils contribuent aussi à l’équilibre financier du pays.
Le spectre d’un retrait massif de capitaux

Du côté des économistes et acteurs de la finance, l’inquiétude monte. Plusieurs analystes anticipent un risque de retraits massifs, voire un déplacement de l’épargne vers des produits étrangers ou non fiscalisés. Un tel mouvement priverait la France d’un levier essentiel de financement interne, au moment où les déficits publics se creusent et où les ménages cherchent à protéger leur pouvoir d’achat.
Si la confiance venait à se fissurer, préviennent-ils, la structure même de l’épargne nationale pourrait en être durablement affectée. La stabilité offerte par l’assurance-vie en euros constitue pour beaucoup un amortisseur durant les périodes d’incertitude économique et d’inflation persistante. La fragiliser reviendrait, selon eux, à affaiblir un outil de cohésion sociale.
Un texte encore loin d’être définitif
Bien que voté en première lecture, l’amendement devra encore franchir l’étape du Sénat, puis d’éventuelles navettes parlementaires. Le gouvernement, prudent, n’a pas encore affiché un soutien clair, laissant entendre que des ajustements sont possibles. Certains députés eux-mêmes appellent à une rédaction plus précise, permettant de distinguer réellement les placements spéculatifs des investissements prudents mais utiles.










