Le Bureau de l’Assemblée nationale a achevé son renouvellement dans un climat de manœuvres stratégiques.

La gauche, qui avait réussi à y imposer sa majorité l’an dernier, perd cette fois son avantage, au profit d’une recomposition où le Rassemblement national retrouve une place centrale, grâce à l’accord implicite entre la majorité présidentielle et Les Républicains.
Jeudi matin, les députés ont élu les douze secrétaires du Bureau de l’Assemblée nationale, ultime étape du renouvellement de cette instance exécutive. Chargé de décisions sensibles, comme les sanctions disciplinaires contre les élus ou la recevabilité des textes, le Bureau est un organe stratégique. Cette fois, la gauche a perdu sa majorité, offrant au Rassemblement national (RN) un retour remarqué, fruit d’une recomposition des équilibres internes.
La mécanique de la répartition proportionnelle

L’an dernier, la gauche avait profité de l’abstention d’une partie du « socle commun » (Renaissance, Horizons, MoDem et LR) pour arracher une majorité, lors de votes nocturnes confus. Mais cette année, Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, a poussé à un retour à une répartition proportionnelle des postes, conforme au règlement. La gauche s’y est opposée pour empêcher l’entrée du RN, mais ce dernier a trouvé un point d’appui auprès des macronistes et des ciottistes, permettant l’adoption de cette logique arithmétique. Résultat : cinq postes pour le RN et ses alliés, neuf pour le socle commun (dont la présidente), sept pour la gauche et un pour le groupe Liot.
Un Bureau recomposé et symbolique
Le nouveau Bureau compte désormais 12 femmes et 10 hommes, un équilibre salué par Yaël Braun-Pivet, qui a insisté sur la sérénité du processus électoral. Mais derrière la façade institutionnelle, le message est clair : le RN, légitimé par cette répartition, fait désormais partie des rouages exécutifs de l’Assemblée, un signal politique lourd de conséquences.

La bataille des commissions s’annonce décisive
Dès ce jeudi après-midi, les députés se retrouveront dans les commissions permanentes pour élire leurs présidents, postes aussi cruciaux que symboliques. La majorité présidentielle entend ravir à la gauche la présidence des Affaires économiques (LFI) et des Affaires culturelles (PS). De plus, le poste de rapporteur général du budget, occupé par Charles de Courson (Liot), est convoité par LR, avec Philippe Juvin en favori potentiel. Le RN, en position d’arbitre, pourrait une nouvelle fois jouer un rôle clé.
À gauche, certains accusent déjà la majorité d’avoir orchestré une alliance tacite avec le RN pour conserver la main sur les instances stratégiques. L’écologiste Jérémie Iordanoff a dénoncé une « réintégration calculée du RN », destinée à sécuriser les présidences de commission. Le président du groupe Liot, Laurent Panifous, a lui aussi mis en garde contre une coalition implicite entre le socle commun et l’extrême droite, jugeant « choquant » un scénario qui favoriserait Philippe Juvin au détriment de De Courson.










