Neuf mois après le drame qui a enflammé les banlieues françaises et déclenché une onde de choc dans l’opinion publique, l’affaire Nahel franchit un tournant judiciaire décisif.
Le parquet de Nanterre a requis un procès aux assises pour meurtre contre le policier Florian M., à l’origine du tir fatal. Une étape capitale dans un dossier devenu emblématique des tensions entre jeunesse et forces de l’ordre en France.
Le 3 mars 2025, le parquet de Nanterre a formellement requis le renvoi de Florian M. devant la cour d’assises pour le chef de meurtre. Le policier, mis en examen depuis l’été 2023, avait tiré sur Nahel, 17 ans, lors d’un contrôle routier le 27 juin à Nanterre. La mort brutale de l’adolescent avait provoqué une série d’émeutes dans tout le pays, ravivant le débat sur les violences policières.
Dans son communiqué, le parquet précise également avoir demandé un non-lieu pour le second policier, présent sur les lieux mais dont la responsabilité pénale n’est pas retenue. Celui-ci bénéficiait jusqu’alors du statut de témoin assisté.
Une version initiale contredite par une vidéo
Dès les premières heures suivant la mort de Nahel, une controverse éclate autour de la légitimité du tir. La version initiale, relayée par les forces de l’ordre, laissait entendre que le jeune conducteur aurait tenté de percuter les policiers. Mais une vidéo amateur diffusée massivement sur les réseaux sociaux est venue contredire cette affirmation.
Sur les images, on aperçoit le policier tirer à bout portant alors que le véhicule de Nahel redémarre lentement. Ce décalage entre les déclarations officielles et les faits filmés a nourri la colère dans les quartiers populaires et déclenché des manifestations exigeant justice.
Une enquête approfondie et des confrontations déterminantes
L’enquête, bouclée le 2 août 2024, s’est appuyée sur de nombreuses expertises, auditions et reconstitutions. Le 5 mai 2024, une reconstitution des faits a été organisée afin de comparer les versions des deux policiers, des témoins et des deux passagers présents dans la voiture de Nahel.
Cette opération, jugée cruciale, avait pour but de déterminer si Florian M. se trouvait effectivement en situation de légitime défense. Selon les éléments recueillis, les conditions du tir n’auraient pas correspondu à un péril imminent, point central de la qualification pénale de meurtre.
Des confrontations ont suivi en juillet 2024, notamment entre la mère de Nahel, les deux passagers du véhicule et le policier mis en cause. Des moments chargés d’émotion qui ont permis de confronter les versions de chacun, tout en nourrissant l’analyse du parquet sur l’intentionnalité du tir.
Un policier brièvement incarcéré
Florian M. avait été incarcéré durant cinq mois après sa mise en examen, avant d’être libéré sous contrôle judiciaire. Une mesure rare dans les affaires de tir policier, qui témoignait déjà de la gravité perçue des faits par l’autorité judiciaire. Depuis sa remise en liberté, il demeure soumis à des restrictions, dans l’attente de la décision finale des juges d’instruction.
Au-delà des procédures, l’affaire Nahel a profondément marqué l’année 2023 en France. Sa mort a déclenché des nuits d’émeutes, des dizaines de blessés, des centaines d’interpellations, mais aussi un débat politique et médiatique brûlant sur le racisme systémique, les pratiques policières et le lien abîmé entre institutions et jeunesse.