Plus de vingt ans après la disparition d’Estelle Mouzin, la justice reconnaît ses propres manquements. Ce mercredi 3 septembre, le tribunal judiciaire de Paris a condamné l’État à indemniser Éric Mouzin, le père de la fillette assassinée par Michel Fourniret, pour les « dysfonctionnements » qui ont entaché l’enquête.
Dans leur jugement, les magistrats parisiens estiment que le manque de moyens humains et les errements de l’instruction ont constitué une « faute lourde », engageant la responsabilité de l’État. Conséquence : une indemnisation de 50.000 euros sera versée à Éric Mouzin, bien loin des 350.000 euros réclamés en juin dernier.
Le tribunal souligne notamment le retard accumulé dès les premières années d’enquête, l’absence de coordination entre juridictions et la gestion chaotique du dossier : pas moins de dix juges d’instruction se sont succédé en dix-sept ans, avec des procès-verbaux lacunaires et des pistes mal exploitées.
La piste Fourniret ignorée trop longtemps
Un point particulièrement sévère concerne le manque d’attention accordé à la piste menant à Michel Fourniret et Monique Olivier. Alors que d’autres tribunaux travaillaient déjà sur des dossiers similaires, la justice française n’a pas su coordonner ses efforts, retardant ainsi la manifestation de la vérité. « Ces dysfonctionnements caractérisent l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission qui lui était confiée », écrit le tribunal.
Une vérité tardive et incomplète
Ce n’est qu’en mars 2020 que Michel Fourniret reconnaît le meurtre d’Estelle Mouzin, dix-sept ans après les faits. Mais le tueur en série meurt en mai 2021 sans avoir été jugé dans ce dossier. Seule Monique Olivier a été condamnée, en décembre 2023, à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité. Elle avait reconnu sa participation indirecte et exprimé des regrets.
Entre regrets et réparation symbolique
Si les juges reconnaissent que des investigations d’une ampleur exceptionnelle ont été menées, ils estiment que les carences initiales ont causé un préjudice moral irréparable à la famille Mouzin. Le tribunal refuse néanmoins de parler de « déni de justice », jugeant cette qualification excessive.